La manif du 29 avril fait l’unanimité chez les partisans de la liberté d’installation, la grève un peu moins : pas facile de laisser tomber ses patients

Article Article

Un appel à la grève des médecins et internes a été lancé à partir du 28 avril pour protester contre une proposition de loi régulant l'installation de la profession, mais le degré de suivi reste une inconnue chez les libéraux, divisés sur les modalités du mouvement.

La manif du 29 avril fait l’unanimité chez les partisans de la liberté d’installation, la grève un peu moins : pas facile de laisser tomber ses patients

© Midjourney X What's up Doc

Les partisans de la liberté d'installation - médecins libéraux, étudiants en médecine, internes, jeunes médecins, soutenus par l'Ordre des médecins et SOS Médecins - appellent aussi à manifester à Paris et dans toute la France le 29 avril.

Cette démonstration dans les rues sera facile à évaluer, ce qui n'est pas le cas du suivi de l'appel à « une grève nationale intersyndicale illimitée à partir du 28 avril », formalisé devant la presse mercredi à Paris par Lucas Poittevin, président de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf).

La conférence de presse, rassemblant différents organes représentatifs des anti-régulation à l'installation, a en effet révélé des fissures dans un front unitaire sur le fond, pas toujours sur la forme.

La grogne vient d'une proposition de loi transpartisane, à l'initiative de Guillaume Garot (PS), censée lutter contre les déserts médicaux. L'article phare a été adopté début avril par l'Assemblée nationale, l'examen du reste du texte étant prévu début mai.

L'article adopté régulerait l'installation des médecins libéraux ou salariés, qui devraient solliciter l'aval de l'Agence régionale de santé (ARS). Il serait octroyé de droit dans une zone qui connaît un déficit de soignants, mais dans les territoires mieux pourvus, le médecin ne pourrait s'installer que lorsqu'un autre s'en va.

Fermeront ceux qui peuvent

« Cette proposition mettra à mal l'attractivité de la médecine libérale, qui est aujourd'hui le premier rempart du système de santé », cingle Lucas Poittevin.

Mais derrière ce grief, les modalités de grève divergent. « Nous, médecins installés, soutenons les jeunes médecins, mais chacun réagira à cet appel suivant sa spécialité. Quand des opérations sont prévues, ce n'est pas évident d'arrêter », résume Philippe Cuq, co-président de l'Union Avenir Spé Le Bloc (syndicat des spécialités médicales et médico-chirurgicales).

« Les modalités de la grève vont évoluer selon les réactions des hommes politiques », poursuit ce responsable.

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/non-la-coercition-les-futurs-et-jeunes-medecins-en-greve-fin-avril-contre-la-ppl-garot

« Fermeront ceux qui peuvent leurs cabinets pour manifester le 29 avril. Mais on sait très bien que dans certains territoires, si des cabinets ferment, il y aura des morts, nous n'appelons pas à la fermeture illimitée des cabinets », rebondit Sophie Bauer, présidente du Syndicat des médecins libéraux (Sml).

La CSMF (Confédération des syndicats médicaux français) s'oppose aussi à une fermeture.

Agnès Giannotti, présidente de Médecins généralistes (MG France, majoritaire) évoque « une fermeture des cabinets pour ceux présents à la manifestation du 29 avril ». La Fédération des médecins de France (Fmf) la prône à partir du 28 avril.

93% des français favorables à la régulation, les patients vont-ils soutenir leur médecin ?

Quelles seraient les conséquences d'une grève suivie sur le système hospitalier, notamment sur les services d'urgence ? « Il y a des dispositions prévues, que ce soit dans le droit public ou dans le droit privé, donc pour le libéral et l'hospitalier, pour faire face à une grève avec des services minimums qui seront établis et gérés par la Direction des hôpitaux », répond Anna Boctor, présidente de Jeunes Médecins.

Quel est le risque, en termes d'image, de faire peser une grève sur des patients ? La présidente de Jeunes Médecins pense « que les Français ne sont pas dupes, ils doivent faire confiance à leurs médecins pour travailler sur l'accès aux soins, plutôt que, parfois, des logiques électoralistes ».

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/la-coercition-cest-notre-ligne-rouge-sait-tres-bien-que-ca-ne-fonctionne-pas-dahlia-laktib

Dans un sondage de l'UFC-Que Choisir réalisé fin 2024, 93% des Français sont toutefois favorables à un encadrement de l'installation des médecins. Et cette semaine, France Assos Santé, voix des usagers du système de santé, dénonce « l'outrance et l'indignité, en regard du nombre de patients en déshérence » des anti-régulation.

Dans Le Monde, un collectif de médecins - dont François Bourdillon, directeur général de Santé publique France de 2016 à 2019 - rappelle par ailleurs la régulation de l'installation vertueuse « des autres professionnels de santé (pharmaciens, infirmières, kinésithérapeutes...) ». Et milite pour limiter « la régulation territoriale aux seuls médecins installés en secteur 2 pratiquant les dépassements d'honoraires ».

Avec AFP

Aucun commentaire

Les gros dossiers

+ De gros dossiers