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En 2024, la HAS a enregistré 4 630 déclarations d’EIGS, soit une hausse de 13 % par rapport à 2023. Cette augmentation ne traduit pas forcément une recrudescence d’incidents mais plutôt une meilleure appropriation du dispositif par les professionnels.
Pourtant, la réalité demeure largement sous-estimée : l’étude ENEIS 3, réalisée en 2019, évaluait entre 160 000 et 375 000 EIGS chaque année dans les seuls services de médecine et de chirurgie. L’écart entre les chiffres observés et ceux déclarés reste donc considérable.
Depuis 2017, 16 060 déclarations ont été analysées. Les erreurs liées aux soins ou à l’organisation restent en première position, représentant plus de trois cas sur dix, suivies des actions du patient contre lui-même, puis des erreurs médicamenteuses et de l’iatrogénie (l'ensemble des effets indésirables provoqués par la prise d'un ou de plusieurs médicaments).
En 2024, un changement notable apparaît : les erreurs de diagnostic et cliniques se hissent parmi les causes les plus fréquentes, traduisant une vulnérabilité particulière dans le repérage et la prise en charge initiale des patients.
Les tout-petits parmi les plus exposés
Entre mars 2017 et mai 2024, 408 déclarations concernaient des enfants de moins d’un an, dont 80 % âgés de moins d’un mois. Plus de la moitié de ces évènements ont conduit au décès.
Les causes immédiates les plus fréquentes sont liées à la prise en charge obstétricale, notamment les défauts d’interprétation du rythme cardiaque fœtal, les complications lors de l’extraction ou encore les retards dans la réalisation des césariennes. Chez les nourrissons plus âgés, les défauts de diagnostic et les erreurs médicamenteuses dominent.
Une analyse spécifique menée sur 328 nouveau-nés montre que 64 % étaient des garçons et que près d’un tiers étaient prématurés, dont certains très grands prématurés. Les conséquences sont lourdes : 54 % de décès et 31 % de cas où le pronostic vital a été engagé.
Plus inquiétant encore, la majorité de ces évènements étaient jugés évitables ou probablement évitables par les déclarants. La HAS en tire dix préconisations, allant de la nécessité de garantir les compétences techniques des équipes obstétricales et néonatales à l’amélioration de la prise en charge des accouchements à risque et des situations de réanimation, en passant par la sécurisation du circuit médicamenteux et le renforcement des dispositifs de prévention en maternité.
Personnel non permanent : un facteur aggravant sous-estimé
Le rapport met aussi en lumière 512 déclarations impliquant du personnel non permanent entre 2017 et 2024. Les conséquences rapportées sont graves : un quart des cas entraînent un déficit fonctionnel permanent et plus d’un tiers des décès. Dans près de huit cas sur dix, ces évènements auraient pu être évités.
Les erreurs médicamenteuses, organisationnelles et matérielles apparaissent comme les causes les plus fréquentes. Les analyses pointent également des facteurs profonds liés aux professionnels eux-mêmes, aux patients et aux tâches à accomplir.
Pour y remédier, la HAS recommande de stabiliser les équipes, de veiller à l’adéquation entre les compétences des intérimaires et les postes occupés, de mieux encadrer leur intégration, et d’améliorer la communication interprofessionnelle afin de réduire les risques liés à ce mode de fonctionnement devenu courant.
Les systèmes d’information, un maillon faible de la sécurité des soins
Enfin, la HAS rappelle que les systèmes d’information restent une source majeure de vulnérabilité. Les facteurs de risques identifiés concernent aussi bien les défauts d’accès aux logiciels pour les nouveaux arrivants que les dysfonctionnements techniques, les erreurs de saisie, les paramétrages inadaptés ou encore le manque d’interopérabilité entre outils.
Pour y faire face, dix préconisations ont été émises, insistant sur la nécessité de garantir la sécurité et la conformité des systèmes, de former systématiquement les professionnels, d’intégrer un volet numérique dans les procédures d’accueil et de renforcer les audits de cybersécurité et la traçabilité des usages.
Le rapport 2024 de la HAS met en évidence une amélioration progressive de la déclaration des évènements indésirables graves, mais celle-ci reste très loin de refléter la réalité du terrain. L’analyse révèle des vulnérabilités spécifiques, en particulier en néonatalogie, dans l’intégration du personnel non permanent et dans l’usage des systèmes d’information.
La HAS appelle à un sursaut collectif, pour ancrer la culture de sécurité au cœur des pratiques médicales et protéger au mieux les patients.
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