Hôpital : les femmes médecins sous-payées !

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Moins 16 % que leurs confrères hommes, à profil et compétences égales, selon une étude de la Drees publiée le 16 septembre dernier. Comment expliquer un tel écart ?

Hôpital : les femmes médecins sous-payées !

La question de l’égalité hommes-femmes serait-elle réellement derrière nous, comme l’affirment certains ? Ce chiffre, anecdotiquement glissé à la fin d’une étude de la Drees, provoque un petit sursaut salutaire : à profil égal, les femmes médecins travaillant à l’hôpital gagnent 16,2% de moins que leurs homologues masculins, alors qu’elles représentent la moitié des effectifs (51%) ! Toujours selon cette étude, l’ensemble des femmes travaillant au sein de la fonction publique hospitalière (soit 89% des aides-soigants, 78% des agents et 51% des personnels médicaux) gagnent 20,6% de moins que les hommes. « Cet écart traduit principalement des répartitions différentes des hommes et des femmes selon les métiers (catégorie hiérarchique, statut, filière d’emploi) », soulignent les auteurs de l’étude. A statut identique (…) l’écart culmine à 16,2% au sein des personnels médicaux, les femmes étant notamment plus jeunes dans cette catégorie ». L’âge serait l’un des critères explicatifs certes, mais encore ?

Les femmes prennent moins de gardes
« Ces chiffres sont toujours surprenants à priori car, comme il y a des grilles salariales à l’hôpital, on imagine que les salaires sont identiques pour les hommes et les femmes médecins, à profil et poste égal. Ce qui fait la différence, c’est souvent le nombre de gardes réalisées, qui permettent d’augmenter sensiblement sa rémunération et qui sont majoritairement prises par les hommes », réagit le Dr Géraldine Pichot, chirurgien-urologue à Marseille et présidente de « Donner des ELLES à la santé ».
Les femmes médecins, hospitalières ou libérales, n’échappent pas à l’éternelle problématique : comment déléguer (un peu) sa charge familiale afin de faire progresser sa carrière ? « Il faut mettre en place des aides pour la garde des enfants auprès des femmes médecins, afin qu’elles puissent prendre davantage de gardes si elles le souhaitent. Les crèches au sein des hôpitaux sont une bonne chose mais les places sont réservées en priorité aux infirmières et difficiles à obtenir pour les femmes médecins », ajoute-t-elle.

De nombreuses études montrent que la féminisation d’une profession ne suffit pas à diminuer les écarts salariaux aux postes à responsabilité. Il faut être pro-actif et aider les établissements à identifier les inégalités et à changer la donne

La féminisation sur les bancs de la fac, avec aujourd’hui davantage d’étudiantes que d’étudiants en médecine, va-t-elle changer la donne ? « Non, c’est une idée reçue : de nombreuses études montrent que la féminisation d’une profession ne suffit pas à diminuer les écarts salariaux aux postes à responsabilité. Il faut être pro-actif et aider les établissements à identifier les inégalités et à changer la donne ». Raison pour laquelle l’association « Donner des ELLES à la santé » travaille à la mise en place d’une Charte d’égalité au sein des hôpitaux. « Le centre hospitalier de Béziers a été le premier à l’adopter. Nous avons aussi été contactés par les hôpitaux de Tours, Grenoble, Nancy, Montpellier et Draguignan », indique le Dr Géraldine Pichot.

Victimes du syndrome de l’imposteur
Pour les femmes libérales et salariées aussi les écarts sont impressionnants. Selon cette étude de l’Insee, les femmes médecins libérales exerçant une spécialité perçoivent en moyenne des revenus 30% inférieurs à leurs confrères masculins et les omnipraticiennes 17% de moins. Un « effet de structure » selon l’organisme d’études, qui s’explique par le fait que les femmes sont plus jeunes que leurs confrères et se répartissent différemment des hommes entre les spécialités ; ces derniers sont en effet plus nombreux au sein des spécialités les plus rémunératrices.
Par ailleurs, les femmes exerçant en libéral ont un volume d’actes par an (3785 en moyenne) sensiblement inférieur à celui des hommes (5 135). Par choix ou par obligation ? La deuxième option est certainement plus proche de la réalité, les femmes exerçant beaucoup plus souvent que les hommes à temps partiel (22% versus 6%) afin de préserver leur vie familiale, selon une enquête intersyndicale de 2019.
Pour les femmes médecins salariées, l’écart de rémunération est là encore important, mais pour une autre raison : la négociation du salaire d’embauche. « Les hommes savent beaucoup mieux négocier leur salaire d’entrée et se mettre en avant. Les femmes souffrent encore trop du syndrome de l’imposteur », indique le Dr Géraldine Pichot. Bref, encore un long chemin à parcourir pour la parité salariale en médecine.

Source:

Lire l'étude de la DREES

Pour en savoir plus : https://www.donnerdesellesalasante.org/

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