Débat : Un accusé aux Assises malgré les résultats d’expertises psychiatriques

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Un homme est actuellement jugé pour une tentative d'assassinat devant la cour d'assises des Hauts-de-Seine contre l'avis de plusieurs psychiatres qui l'avaient diagnostiqué schizophrène et déclaré irresponsable pénalement.

Débat : Un accusé aux Assises malgré les résultats d’expertises psychiatriques

En janvier 2019, l'accusé avait pris le train à Toulouse avec deux pistolets à plombs chargés, pour se rendre à Colombes au domicile d'un homme sur lequel il avait ouvert le feu à plusieurs reprises, le blessant légèrement.

A l'origine de cette tentative, un triangle amoureux "fantasmé" de la part de l'accusé, qui est diagnostiqué schizophrène, avait révélé l'enquête.

Trois expertises psychiatriques avaient alors toutes conclu à l'irresponsabilité pénale de l'accusé.

Mais la chambre de l'instruction a jugé en mai 2021 que le comportement de l'accusé révélait "une détermination, une préparation, une conscience de violer la loi" et "un ancrage dans le réel peu compatible avec une abolition totale du discernement" et ordonné son renvoi devant une cour d'assises.

Depuis le début du procès mardi, les experts-psychiatres ont confirmé à la barre leur diagnostic : les actes de l'accusé répondent à une "logique délirante" résultant de sa pathologie et nécessitent son placement en hôpital psychiatrique plutôt qu'en prison.

"Le libre-arbitre (de l'accusé) était totalement effondré au moment des faits", a résumé l'un d'eux, le Dr Jean-Charles Pascal.

 Lors de sa plaidoirie, l'avocat des parties civiles, Me Julien Zanatta, a regretté les "carences" des experts et insisté sur les "actes préparatoires" qui ont, à ses yeux, caractérisé la préméditation de l'accusé et, de fait, sa responsabilité pénale.

"C'est la première fois dans les annales judiciaires que je vois une personne dont quatre experts ont établi l'irresponsabilité pénale renvoyée devant une cour d'assises"

A l'inverse, l'avocat général s'est lui fondé sur l'avis des psychiatres pour requérir l'irresponsabilité de l'accusé. Il a toutefois ajouté qu'il "comprendrait tout à fait" que les jurés prennent simplement en compte "l'altération du discernement" en fixant sa peine.

Dans ce cas, il a souhaité que la cour prononce une peine réduite de quinze ans de réclusion au vu des troubles mentaux "évidents" de l'accusé, qui a reconnu les faits.

"C'est la première fois dans les annales judiciaires que je vois une personne dont quatre experts ont établi l'irresponsabilité pénale renvoyée devant une cour d'assises", a pour sa part déploré l'avocate de la défense, Me Daphné Pugliesi.

"La chambre de l'instruction a rendu sa décision un mois après la décision de la Cour de cassation dans l'affaire Sarah Halimi, j'ai eu l'impression que [l'accusé] a été pris au milieu de cet émoi", a-t-elle plaidé.

Après la mort de la sexagénaire juive en 2017, tuée par un grand consommateur de cannabis en état délirant, l'irresponsabilité pénale avait été prononcée. L'absence d'un procès avait suscité une vive émotion, qui avait poussé le gouvernement à faire voter, en décembre dernier, une réforme du régime d'irresponsabilité pénale.

La cour d'assises de Nanterre doit rendre son verdict vendredi.

Avec AFP

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