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Mise à jour du 10 mars 2025
Le tribunal de Thonon a condamné ce lundi deux frères pour l'agression de plusieurs soignants, le 8 janvier aux urgences de l'hôpital privé d'Annemasse, à trois et six mois de prison ferme. Ils sont reconnus coupables de violences aggravées sur quatre soignants, des faits qu'ils contestent.
Les deux frères poursuivis pour l'épisode de violences aux urgences de l'hôpital privé d'Annemasse, le 8 janvier dernier, ont été condamnés ce lundi à 12 mois de prison, assortis de six mois de sursis pour l'un et neuf mois pour l'autre. Les peines de prison sont à effectuer à domicile, sous surveillance électronique.
L'avocate des deux frères a indiqué qu'elle faisait appel du jugement. Ses clients contestent les faits. Le procès, qui s'est tenu mi-février pendant plus de 10 heures, est venu semer le doute face aux deux versions, celle des deux frères et celle des soignants. « C'est une terrible injustice, dit le plus jeune frère après avoir entendu le jugement. Je le dis encore, on a rien fait du tout. Rien de rien. Aucun coup, aucune insulte, aucune menace, Rien de tout ça. »
Article du 18 février 2025
Que s'est-il réellement passé le soir du 8 janvier à l’hôpital privé Pays de Savoie d’Annemasse ? Lors de l’audience devant le tribunal de Thonon-les-Bains, le personnel de l’hôpital et les deux prévenus, âgés de 25 et 33 ans, ont livré des versions aux antipodes de cet épisode, qui a suscité de vives condamnations.
Les soignants ont rapporté avoir été victimes d'une agression très violente. Ils ont décrit des coups de pied et de poing, des cris, des cheveux tirés, des collègues poussés, un autre traîné « sur quatre à cinq mètres », « un mouvement de foule » et « une grande violence sur un temps très court ». Selon France 3, sept d'entre eux ont même été victimes de fractures ou d’hématomes.
« C'est tout faux, tout simplement », ont insisté les deux frères, dont l'aîné était arrivé aux urgences avec une importante blessure à la tête, à la suite d’un accident du travail.
Le tribunal est revenu minutieusement sur la chronologie de l'événement. Selon les éléments de l’enquête, dès l'arrivée aux urgences des deux frères, une aide-soignante a signalé au blessé, qu’en l’absence de sa carte vitale, sa prise en charge risquait d’être compliquée.
Les deux hommes, qui avaient été interpellés le lendemain des faits, s'étaient présentés au commissariat d'Annemasse pour se plaindre des conditions de leur admission à l'hôpital et d'un refus de soin.
Une vidéosurveillance ambiguë
À la barre, le plus jeune prévenu a accusé le personnel de l'avoir laissé dans le « doute » quant à la prise en charge de son frère, pour des raisons administratives. Mais ce n’est pas tout : « certains sentaient l'alcool », a-t-il également affirmé.
Le pot de Noël de l'équipe des urgences se déroulait en effet ce soir-là, et des agents en service avaient rejoint ceux hors service. Mais « il n'y avait pas d'alcool », ont assuré plusieurs parties civiles.
Un témoin des urgences, cité par Mediapart, a pourtant affirmé qu’une infirmière « n’était pas dans son état normal », mais « on ne savait pas si elle avait bu ou fumé ».
Le tribunal a pu visionner les images des caméras de surveillance présentes dans le service, sauf celle qui aurait pu filmer la majorité de la scène, qui était hors-service cette nuit-là. Une anomalie qui a retenu l’attention des policiers venus à l’hôpital dès le lendemain pour saisir les enregistrements. Ils ont été priés de « ne pas rentrer dans les locaux et de patienter à l’extérieur », relate le site d’informations.
Certaines images montrent des gestes de violences difficilement attribuables aux uns ou aux autres. Mais selon Mediapart, une d'entre elles montre une aide-soignante donner un coup de pied sur l’un des patients, alors qu'il est étendu sur le sol. Sur un autre enregistrement, on voit un infirmier frapper violemment une porte avec son poing, alors que les deux patients avaient quitté l’hôpital depuis une dizaine de minutes.
Les déclarations du témoin nuancent également la version des soignants. Selon lui, un infirmier, non en service ce soir-là, aurait « poussé violemment » l’un des frères, puis l’aurait « saisi avec ses deux poings au niveau du torse ».
En revanche, le témoin dit n’avoir jamais vu le patient frapper les soignants. Il a d’ailleurs tenu à venir témoigner auprès de la police, en voyant le traitement médiatique de l’agression, « pour que les deux jeunes soient jugés avec la réalité des faits », selon Mediapart.
Ce même témoin aurait même été contraint d’intervenir auprès d’un médecin qui « tenait par le col le blessé » alors allongé par terre, en brandissant son « poing armé au-dessus de sa tête ».
Une enquête « menée exclusivement à charge »
La défense a demandé la relaxe des deux prévenus, en décrivant une enquête « menée exclusivement à charge », dans « un contexte de pressions politiques et médiatiques ». Après l'incident, le ministre de la Santé Yannick Neuder s'était rapidement rendu sur place pour dénoncer une violence « intolérable ».
Me Mauger-Poliak, l’avocat des prévenus, a également dénoncé « le parti pris immédiat des fonctionnaires de police dans leur enquête alors même que les premiers éléments recueillis contredisaient la version des soignants ».
Quant à l'avocate des soignants et de l'hôpital, elle a rappelé que l'établissement « s'est arrêté pendant presque une semaine. Il y a eu des préjudices conséquents ». Soutenant qu'il n'y a pas eu de refus de soin, elle a ajouté que dans cette histoire, « il n'y a pas 14 menteurs ».
Le procureur Xavier Goux-Thiercelin a réclamé la condamnation des deux frères à 18 mois d'emprisonnement, dont six mois avec sursis probatoire, avec mandat de dépôt. Alors, véritable agression violente ou récit monté de toutes pièces ? La décision sera rendue le 10 mars.
Source:
AFP / Mediapart / France 3
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