Agnès Giannotti (MG France) démonte le PLFSS 2026 : « C’est de l’irresponsabilité politique »

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Lors d’une conférence de presse, ce matin, la présidente de MG France, Agnès Giannotti, a livré une analyse au vitriol du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 et des réformes en cours. Entre franchises médicales, Ondam irréaliste, dérives technocratiques et campagnes de ciblage, elle dénonce une politique de santé « déconnectée du réel » et un climat « traumatisant » pour les médecins.

Agnès Giannotti (MG France) démonte le PLFSS 2026 : « C’est de l’irresponsabilité politique »

Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France.

© DR.

L’Ondam « impossible à tenir »

Agnès Giannotti dénonce un Ondam de ville fixé à 0,88 %, jugé irréaliste au regard de l’inflation et des besoins de santé. Selon elle, il est volontairement conçu pour déclencher un comité d’alerte et bloquer toute revalorisation conventionnelle.

« On sait dès le départ qu’il est impossible à tenir. Est-ce que ce n’est pas fait pour ? Fixer un Ondam pareil, c’est programmer le mur. »

Elle y voit une atteinte au dialogue social entre le gouvernement et les syndicats médicaux :
« Si de comité d’alerte en comité d’alerte plus rien n’est respecté, quel sens donner encore au dialogue social ? »

Le doublement des franchises : « une taxe sur les malades »

La présidente de MG France s’oppose fermement à la hausse des franchises médicales que le gouvernement présente comme un « forfait de responsabilité ».

« Oser parler de forfait de responsabilité, c’est inadmissible. Moi, j’y vois un forfait d’irresponsabilité politique. »

Elle rappelle que la dépense de santé n’est déjà pas gratuite pour les Français :
« Il y a 20 milliards d’euros de reste à charge direct, sans compter les mutuelles. Ce n’est pas vrai que la santé est gratuite. »

Et elle dénonce l’impact social de la mesure :
« C’est une taxe sur les plus malades et les plus modestes, ceux qui sont juste au-dessus des minima sociaux. »

Elle souligne aussi le risque de désengagement de l’État au profit des complémentaires santé :
« Il n’y a pas d’argent magique : les 400 millions pris aux complémentaires seront payés par les patients, sous forme de hausse de cotisation. »

Mais pour Agnès Giannotti, la mesure franchit un nouveau seuil d’absurdité en voulant faire des médecins les collecteurs eux-mêmes de ces franchises :
« Le gouvernement veut que nous prélevions les 4 euros sur chaque consultation, y compris pour les patients en ALD. C’est une charge administrative ingérable. Il faudrait tenir une double comptabilité et savoir si les plafonds sont atteints ou non. »

Elle y voit une attaque directe contre le tiers payant :
« Les médecins qui ne font pas le tiers payant seront dispensés de ce rôle de percepteur. Cela veut dire que ceux qui continueront à le pratiquer seront pénalisés. Au final, les plus modestes paieront plus cher et perdront le bénéfice du tiers payant. Bravo la politique sociale ! »

L’article 19 du PLFSS : « un faux discours de prévention »

Sous couvert de prévention, l’article 19 introduit selon elle une restriction d’accès au statut d’affection de longue durée (ALD).

« C’est une mesure pas franche, un article joliment intitulé pour faire passer une restriction comme une avancée. »

Elle y voit une tentative de modification des critères d’admission en ALD, notamment pour les diabétiques :
« Ce n’est pas écrit, mais c’est pensé très fort. Derrière le parcours coordonné renforcé, c’est la remise en cause du droit aux soins pour les malades chroniques. »

Et elle avertit :
« Si un diabétique n’est plus reconnu en ALD avant les complications, c’est la fin de la prévention secondaire. On aura des parcours dégradés. »

Le DMP : « une usine à gaz technocratique »

L’article 31 du PLFSS impose aux médecins de renseigner le DMP (Dossier Médical Partagé) sous peine d’amendes jusqu’à 10 000 €. Agnès Giannotti s’en moque ouvertement :

« Lisez-le, c’est du jargon technocratique. Ils n’ont même pas les outils pour le faire. »

Elle dénonce un outil mal conçu :
« Le DMP n’est pas fait pour nous. On ne gagne pas du temps, on en perd. Ils n’ont jamais essayé de s’y connecter. »

Et interpelle directement les décideurs :
« Qu’ils viennent dans nos cabinets voir combien de temps il faut pour ouvrir un DMP ! »

Les centres de soins non programmés : « la financiarisation des soins primaires »

Concernant l’article 21 sur les structures de soins non programmés, elle alerte sur la dérive de leur développement.

« On voit l’arrivée massive de la financiarisation sur les soins primaires. Ces centres trient les patients et ne prennent que les actes faciles. »

Elle critique le manque de régulation et la complaisance des autorités :
« Ces centres ne sont ni identifiés ni contrôlés. Et parfois, on les inaugure en grande pompe avec l’ARS et le maire ! »

MG France se montre très vigilante quant au risque d’un système à deux vitesses :
« Est-ce qu’on veut les encadrer ou les favoriser ? C’est l’avenir qui nous le dira. »

Limitation des arrêts de travail : « une atteinte à la médecine du réel »

L’article 28 vise à limiter la durée initiale des arrêts de travail à 15 jours en ville et 30 jours à l’hôpital. Agnès Giannotti y voit une méconnaissance du terrain :

« Ce qu’on a en face, ce n’est pas des tableaux Excel, ce sont des patients. »

Elle rappelle que l’arrêt de travail est un acte thérapeutique à part entière :
« Les arrêts font partie du traitement, au même titre que les médicaments. »

Et souligne l’absurdité du dispositif :
« Un arrêt limité à 30 jours pour une jambe cassée ? On va juste multiplier les consultations inutiles. »

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/toutes-les-reformes-inquietantes-pour-les-medecins-proposees-dans-le-plfss-2026

Absence de mesures sur les conditions de travail : « une occasion manquée »

La présidente regrette que le facteur travail soit ignoré dans le PLFSS, alors qu’il pèse lourd dans les arrêts maladie.

« Les troubles musculosquelettiques et la souffrance morale sont des causes majeures. Et pourtant, rien pour inciter les employeurs à améliorer les conditions de travail. »

Elle plaide pour un système de cotisation modulée selon la sinistralité, à l’image des maladies professionnelles :
« Si on faisait varier la cotisation maladie des employeurs selon le nombre de journées indemnisées, on verrait les arrêts baisser. »

Campagnes de ciblage des médecins : « des pratiques traumatisantes et injustes »

Elle fustige la troisième campagne en deux ans contre les « gros prescripteurs » d’arrêts maladie, menée par l’Assurance maladie.

« C’est inefficace, injuste et traumatisant pour la profession. »

Elle dénonce l’opacité du système :
« Nous n’avons toujours pas eu communication de l’algorithme de ciblage. C’est inacceptable. »

Et souligne le climat de peur :
« On nous traite comme des fraudeurs. On assimile notre pratique normale à du blanchiment d’argent. C’est inimaginable. »

Cette pression aurait déjà des conséquences humaines dramatiques :
« Nous avons perdu une consœur, très impliquée, mise sous objectif et épuisée. Ces objectifs inatteignables tuent. »

Agnès Giannotti clôt sa prise de parole sur un constat grave :
« Nos patients vont de plus en plus mal, mais nos médecins aussi. »

1 commentaire(s)
Arnaud B Médecine générale 23 octobre 2025 14:06

MGF pousse des cris d’orfraie alors qu’ils se vendent depuis des décennies à la CNAM avec des conventions iniques. On ne règle pas les problèmes avec ceux qui ont contribué à les créer… trop facile de bomber le torse maintenant et difficile de se plaindre de la cause que l’on chérit. Le socialisme a toujours mené à l’inefficacité et à la faillite, cela continue et continuera. 
Merci MGF

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