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Les « anticorps conjugués » (acronyme ADC en anglais) font de mieux en mieux. Le principe est de lier un médicament par chimiothérapie à un anticorps : celui-ci va spécifiquement repérer les cellules cancéreuses, afin de ne pas attaquer sans discrimination les cellules saines.
Cette famille de thérapies avait fait ses preuves contre les cancers métastasés. Elle semble désormais pouvoir aussi bénéficier à des cancers encore localisés.
« Plusieurs études de phase 3 ont montré l’efficacité d’une nouvelle génération de ces anticorps conjugués », observe Fabrice André, président de l’Esmo et directeur de la recherche à l’Institut Gustave Roussy. Trois essais présentés à Berlin ont ainsi montré une diminution du risque de rechute ou une survie sans rechute, dans des cancers localisés du sein (de type HER2), à haut risque de récidive, et de la vessie.
Plusieurs spécialistes espèrent que ces anticorps puissent un jour être utilisés face à des cancers à un stade précoce, pour lesquels la chimiothérapie classique reste actuellement la règle.
Immunothérapie personnalisée et thérapies cellulaires
Une thérapie cellulaire innovante contre une tumeur rare : des lymphocytes T, tirés du sang de patients et reprogrammés génétiquement, ont donné des résultats prometteurs d’efficacité contre un mélanome de l’œil avancé ou métastasé, selon un essai présenté à Berlin lors d’une session phare.
Actuellement, environ un tiers des patients ayant ce mélanome de l’uvée peuvent développer des métastases, « presque toujours dans le foie », et subissent, souvent sans succès, des traitements lourds, selon Manuel Rodrigues de l’Institut Curie.
La nouvelle stratégie, qui cible ces métastases au foie, crée un espoir, mais comporte plusieurs contraintes.
Plus largement, cette avancée illustre les promesses des thérapies cellulaires, « une lame de fond dans les années à venir » selon le président d’Unicancer – regroupement des centres anti-cancer français –, le professeur Jean-Yves Blay. Il pointe cependant « la difficulté d’organiser leur mise à disposition dans les pays occidentaux vu les contraintes budgétaires ».
Une prise de sang pour guider les traitements
Pour mieux guider la délivrance de traitements et contrer plus tôt des rechutes, la quête d’ADN issu de cellules cancéreuses à partir d’une prise de sang, également appelée biopsie liquide, reste porteuse.
Cette technologie « paraît destinée à un grand avenir pour un très grand nombre de tumeurs », prédit le professeur Blay.
Ainsi, une étude dévoilée à l’Esmo a conclu que la biopsie liquide était fiable pour délivrer au moment adéquat une immunothérapie à des patients ayant subi une chirurgie, avec une diminution du risque de rechute.
Mais des limites demeurent. Une autre étude a montré que, dans le cancer du côlon, la biopsie liquide « ne permet pas de désescalader les traitements » même quand elle montre l’absence d’ADN tumoral dans le sang, prévient Fabrice André.
La Chine accélère sa présence dans la recherche anticancer
La Chine et sa présence grandissante dans la recherche de nouveaux médicaments anti-cancer se sont aussi manifestées au grand rendez-vous européen de l’oncologie.
Par exemple, contre deux types de cancer du poumon au stade de métastases, les résultats de deux traitements de nouvelle génération présentés à Berlin sont jugés prometteurs, mais évalués seulement sur des patients chinois à ce stade.
L’un de ces traitements utilise un anticorps ayant deux cibles – blocage de la prolifération des cellules cancéreuses et des vaisseaux sanguins alimentant la tumeur – et sa combinaison chimiothérapie-immunothérapie fait mieux qu’une immunothérapie seule.
« La balance est en train de se déplacer un peu sur la géographie planétaire » de la recherche clinique en oncologie, note le professeur Jean-Yves Blay, jugeant que « les Chinois arrivent avec des études sophistiquées, des molécules originales et des travaux assez convaincants ».
Reste à vérifier si leurs résultats se confirment sur des populations non chinoises, avec des études jumelles en Europe ou aux États-Unis, voire avec d’autres méthodes plus rapides mais respectant les standards de sécurité occidentaux.
« Médicalement », juge le professeur Fabrice André, « c’est une bonne nouvelle que davantage de grands pays s’intéressent à la découverte de médicaments ».
Avec AFP