8 médecins sur 10 sont en souffrance face à la mort

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Alors que les médecins ont dû faire face à davantage de décès de patients depuis le début de la pandémie, une étude de la SFC décrypte l’état de mal-être psychique et émotionnel dans lequel se trouvent une majorité d’entre eux lors du décès d’un de leurs patients. 

8 médecins sur 10 sont en souffrance face à la mort

Un tiers des médecins en état de stress post-traumatique face à la mort de l’un de leurs patients, et l’état des internes n’est guère mieux... Ces résultats inquiétants sont issus d’une enquête inédite menée par trois sociétés savantes, dont la Société française de cardiologie, qui se penche sur les conséquences émotionnelles de la mort de leurs patients sur les personnels soignants en cardiologie.
Dans cette spécialité en première ligne, la technicisation (pacemakers, stents, valves artificielles…) a modifié le rapport à la mort et sa survenue risque d’autant plus d’être vécue comme un échec que les limites de la vie sont sans cesse repoussées. Une nouvelle donne partagée par de nombreuses autres spécialités médicales et chirurgicales

Des niveaux élevés d’anxiété et dépression

Plus de 900 cardiologues, anesthésistes-réanimateurs et chirurgiens du coeur ont répondu en 2021 à cette enquête via un auto-questionnaire utilisant plusieurs échelles validées (HADS pour le niveau d’anxiété et de dépression, MBI pour le burn-out et IES-R pour l’état de stress post-traumatique).
 

Un taux de réponse élevé et des résultats inquiétants qui ont surpris les commanditaires de l’étude, tant ce sujet reste tabou aujourd’hui. « L’état psychique des soignants du cœur est assez inquiétant : un tiers d’entre eux ont un niveau d’anxiété et/ou de dépression qui nécessite une prise en charge psychologique, 45% d’entre eux souffrent d’épuisement professionnel et 33% présentent un état de stress post-traumatique », souligne le Pr Thibaud Damy, cardiologue à l’Hôpital Henri Mondor à l’origine de l’étude pour la SFC.
 

Autre enseignement alarmant : les médecins se retrouvent bien seuls au moment de la mort d’un patient qui les impacte : ils ne sont que 50% à déclarer pouvoir compter sur leurs collègues et/ou leur famille pour en parler.
Par ailleurs, les médecins sont nombreux à avouer la prise de toxiques après avoir été confrontés au décès de l’un de leurs patients : 17% d’entre eux consomment de l’alcool et/ou du cannabis, 10% des psychotropes (anxiolytiques, antidépresseurs, neuroleptiques). Et ils ne sont que 12% à consulter un psychiatre ou un psychologue.

Quelles pistes d’action ?

« L’enjeu est énorme car la pandémie a accentué la souffrance des soignants, qui quittent massivement l’hôpital. Cette étude met en évidence la nécessité urgente, au-delà du manque de moyens, de prendre soin des soignants pour qu’ils puissent prendre soin des patients », estime le Pr Damy.
Voici les pistes d’action envisagées par la SFC pour « briser ce tabou tous ensemble » : le lancement d’une deuxième étude auprès des professionnels paramédicaux en cardiologie « car toutes ces questions doivent être gérées en équipe » ; la création d’une chaîne Youtube permettant de visionner des témoignages de soignants ; la demande d’aide aux institutions hospitalières pour la prise en charge des équipes.

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