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Samar, 21 ans, habite dans un dortoir avec six autres étudiantes dans une résidence universitaire de La Havane. Depuis le 7 octobre et le déclenchement de la guerre, elle dit ressentir souvent le désir de retourner auprès de sa famille.
"Ce serait plus facile pour moi d'être avec eux que d'avoir toutes ces pensées", de ne pas savoir "ce qu'ils boivent, ce qu'ils mangent, où ils dorment", raconte la jeune femme à propos de sa mère, ses deux frères et sa sœur qui vivent dans la Bande de Gaza.
Mais elle se souvient aussi de ce que sa mère lui dit lors de leurs rares échanges : "Nous sommes fiers de toi, nous sommes fiers d'avoir quelqu'un hors de Gaza qui étudie la médecine", relate Samar à l'AFP.
La jeune femme fait partie des 247 étudiants palestiniens, dont 75 Gazaouis, qui apprennent la médecine à Cuba grâce à une bourse du gouvernement, selon les chiffres fournis à l'AFP par l'ambassadeur palestinien Akram Samhan.
De nombreux médecins formés gratuitement sur Cuba
L'île communiste octroie de longue date des bourses à des étudiants étrangers. Quelque 1 500 Palestiniens, dont de nombreux médecins, y ont été formés gratuitement depuis 1974, selon le diplomate.
La guerre a été déclenchée le 7 octobre par l'attaque du Hamas dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort de 1 194 personnes, selon un décompte de l'AFP à partir de données officielles israéliennes. Sur 251 personnes enlevées, 116 sont toujours retenues en otages à Gaza, dont 41 sont mortes, selon l'armée.
En riposte, l'armée israélienne a lancé une offensive d'envergure à Gaza qui a fait 37 372 morts, majoritairement des civils, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza dirigé par le Hamas.
Les étudiants dans un stress constant
Samar raconte que sa famille, qui vivait dans le nord de la Bande de Gaza, a dû se déplacer à plusieurs reprises pour fuir les bombardements, et se trouve actuellement à Deir el-Balah, dans le sud de l'enclave.
"Ils ouvrent Whatsapp, m'envoient un message, On va bien, et on ne sait pas quand on aura d'autres nouvelles", explique en espagnol Samar qui a bénéficié, comme tout étudiant étranger, d'un apprentissage accéléré de la langue à son arrivée en 2022.
La jeune femme, en deuxième année de médecine, dit avoir récupéré des forces après une période de dépression. Son objectif, en parallèle de ses études, est désormais de défendre "la cause palestinienne".
Motee Almashar, 24 ans, originaire de Rafah, dans le sud, raconte qu'il tente, avec ses amis palestiniens, de retrouver une vie normale "pour enlever un peu de stress".
L’étonnement à propos de l’engouement des étudiants du monde entier pour la cause palestinienne
Mais ce n'est pas facile "dès qu'on prend son téléphone, on voit les nouvelles", raconte-t-il. Une des dernières fois qu'il a parlé à sa mère, "elle était très triste". Début mai, lors d'un bombardement à Rafah, "mes cousins, trois de mes oncles, une tante et ma grand-mère ont été tués".
La vie économique de ces étudiants est aussi perturbée. Ils ne reçoivent plus d'argent de leurs parents à Gaza. L'ambassadeur explique avoir lancé une collecte auprès d'organisations palestiniennes basées aux États-Unis et ailleurs pour tenter de "résoudre partiellement" leurs problèmes.
Dans ce contexte difficile, ces étudiants disent avoir observé avec étonnement le mouvement de protestation qui a pris corps ces derniers mois dans des universités aux États-Unis, en Europe et en Amérique latine.
La Bande de Gaza a « un besoin urgent de médecins »
"Nous pensions être les seuls à défendre la cause palestinienne (...) ce que font les étudiants a changé notre regard sur le monde extérieur", confie Samar. Motee se dit "très fier de voir des étudiants" s'exprimer "dans le monde entier" au nom des Palestiniens.
Mohammed Refat Almassri, 26 ans, qui a perdu un oncle et huit cousins dans la guerre, est en dernière année de médecine. Fils d'un ambulancier qui travaille sans relâche dans la Bande de Gaza, il sait que l'enclave a "un besoin urgent de médecins".
Bientôt diplômé, il envisage d'y rejoindre le corps médical, mais ne sait pas quand il pourra rentrer ni comment payer son billet d'avion.
Avec AFP