La Covid-19 vient rappeler à la communauté scientifique internationale qu’elle n’a « jamais pu, à ce jour, développer de vaccins contre les infections humaines à Coronaviridae malgré deux alertes récentes : l’émergence du SARS-CoV-1 en 2002 et celle du MERS-CoV en 2010 », rappelle dans un communiqué du 10 juin l’Académie de médecine qui ajoute que les seuls vaccins anti-coronavirus existants ont été développés dans le domaine vétérinaire, « le plus souvent sous forme de vaccins vivants atténués, et ont une efficacité limitée ».
Les effets catastrophiques de la pandémie actuelle sur la santé et l'économie mondiales, l’absence de traitement antiviral disponible et la perspective d’une persistance probable du SARS-CoV-2 dans les années futures rendent plus que jamais nécessaire la mise au point d’un vaccin humain efficace, « seul moyen de prévenir l’infection et de contrôler sa propagation », poursuivent les sages qui indiquent que plus de 120 candidats vaccins sont en cours de développement dans le monde entier.
Gare à l'excès d'optimisme
Les prévisions les plus optimistes envisagent un délai minimum de 12 à 18 mois pour la mise au point d’un premier vaccin contre la Covid-19, « qui dépassera très probablement la fin de l’épidémie » selon l’Académie de médecine qui estime qu’il faut tempérer cet optimisme au regard des nombreux obstacles à surmonter pour développer un tel vaccin.
Tout d’abord parce que si l’élimination du SARS-CoV-2 semble nécessiter une réponse cellulaire et humorale, « les corrélats de protection immunitaire ne sont pas encore bien établis et l’on ne connait pas la durée de l’immunité protectrice conférée par l’infection naturelle ».
Par ailleurs, les modèles animaux sont quantitativement limités, tant les souris transgéniques porteuses du récepteur ACE2 que les furets et les macaques (rhésus et cynomolgus), selon les sages qui ajoutent que « le risque d’initier une réponse immunopathologique par production d’anticorps facilitants, constaté lors des essais vaccinaux précliniques contre le SRAS et contre le MERS en utilisant la protéine S (spike) entière, ne doit pas être négligé ».
5 recommandations
Un bon vaccin contre le SARS-CoV-2 devrait idéalement « stimuler à la fois l’immunité cellulaire pour une protection locale (IgA muqueuses) et l’immunité humorale pour une protection générale (IgM et IgG neutralisantes) tout en évitant l’apparition d’anticorps facilitants », conclut l’Académie, qui compte tenu des incertitudes sur la mise à disposition prochaine d’un vaccin Covid-19, recommande :
- de favoriser une coordination internationale de la recherche en vaccinologie en encourageant les équipes engagées dans le développement d’un vaccin Covid-19 à partager les informations relatives aux corrélats de protection, aux modèles précliniques, afin de réduire les délais préalables aux études cliniques, et à planifier des essais vaccinaux concertés ;
- de faciliter les contacts précoces et fréquents avec les autorités réglementaires de manière à développer un consensus harmonisé sur la conception des vaccins et sur les conditions préalables nécessaires à leur développement et leur enregistrement ;
- de s’assurer que les financements mis en place au niveau mondial pour le développement d’un vaccin Covid-19 privilégient l’objectif d’un accès global équitable à ce vaccin ;
- de maîtriser la communication sur le développement et la mise en œuvre des candidats vaccins en évitant toute déclaration prématurée pouvant susciter de faux espoirs dans le grand public ;
- de maintenir et renforcer les mesures barrière, seul moyen actuellement disponible ayant fait preuve d’efficacité, tant que la circulation du SARS-CoV-2 dans la population n’est pas interrompue.