
© Midjourney x What's up Doc
Deux ans plus tard, la justice a donné raisons aux internes. Le CHU de Poitiers devra se munir d’un logiciel « fiable » de décompte de leurs heures de travail, selon le jugement rendu le 20 février par le tribunal administratif de la ville.
« Une avancée considérable en faveur du respect du temps de travail des internes », ont salué ce matin dans un communiqué commun les syndicats Isni et Isnar-IMG (pour les internes de médecine) et FNSIP-BM (pour ceux de pharmacie et biologie médicale).
Ceux-ci avaient déposé un recours fin 2022, face aux refus « de nombreux CHU » de se doter d’un dispositif de décompte effectif.
« Il s’agit du premier jugement en notre faveur » sur cette question, a réagi auprès de What’s up Doc Killian L’helgouarc’h, président de l’Isni. « Cette décision va à rebours de ce que les juges ont décidé dans leurs tribunaux depuis un an ».
Tout le monde sait
Pour rappel, depuis 2015, le temps de travail maximum légal d’un interne est fixé à 48 heures par semaine (dix demi-journées hospitalières et deux demi-journées universitaires). Une limite trop souvent dépassée, en témoigne l’enquête publiée l’année dernière par les trois syndicats en question. Celle-ci révélait que sur les 2 300 internes interrogés, 80% dépassaient le temps de travail légal de 48 heures par semaine. 10% d'entre eux affirmaient même travailler plus de 80 heures.
Face au combat sans relâche des syndicats d’internes pour un décompte clair de leurs heures de travail, le Conseil d’État avait écrit, dans sa décision du 22 juin 2022, que les hôpitaux devait se munir d’un « dispositif fiable, objectif et accessible permettant de décompter (….) le nombre journalier d’heures de travail effectuées par chaque agent, afin de s’assurer que la durée » ne dépasse pas les 48 heures légales sur une période moyenne de trois mois.
Malgré ces clarifications sur les obligations qui « pèsent » sur les établissements de santé, « de nombreux CHU refusent toujours de se doter d’un logiciel de décompte des heures de travail des internes », à l’image du CHU de Poitiers, dont le refus a précipité le recours devant la juridiction administrative.
Désormais, selon le jugement du tribunal, l'établissement devra en changer pour se munir, dans un délai de trois mois, « d’un dispositif fiable, objectif et accessible », ce que le logiciel actuel ne fait pas, « se bornant à reproduire les tableaux de service prévisionnels » précise le communiqué.
« Le signal envoyé est clair et résonne au-délà du CHU de Poitiers : les établissements doivent se conformer à leurs obligations, sous peine d’être condamnés par les tribunaux », écrivent encore les syndicats dans le communiqué.
Car les autres CHU devraient suivre la même voie : « le recours est en cours partout en France, dans un tiers des cas, nous sommes en médiation pour trouver un terrain d’entente », a précisé Killian L’helgouarc’h.