
What's up Doc. Comment est né le réseau Serenice ?
Didier Sensey. Cette idée est née de réflexions avec des professionnels de santé. Pour ma part, je représente Nehs, qui est la partie industrielle de ce groupement d’intérêt économique. Nous avons donc mené une réflexion avec des médecins, des radiologue llibéraux, des radiologues hospitaliers, des PU-PH… de manière à avoir une représentation la plus large possible de toutes les sensibilités de la profession. Il y a en fait 80 radiologues dans Serenice, qui se sont dit qu’ils allaient travailler ensemble, pour répondre aux enjeux de la prise en charge aujourd’hui. Il faut bien comprendre que nous faisons cela pour le patient. Et que nous dit le patient ? Il nous dit que lorsque l’on appelle un cabinet de radiologie, parfois cela ne répond pas. Quand on a la chance d’avoir un rendez-vous, il faut attendre au minimum trois semaines. Il faut par ailleurs faire plusieurs dizaines de kilomètres pour avoir accès à un centre de radiologie. Et quand on arrive en cabinet de radiologie, on n’est pas forcément bien accueilli : le radiologue reste derrière son écran, le patient ne le voit pas forcément. Un examen de dix minutes chrono peut durer deux à trois heures de plus dans la salle d’attente. La cause de tout cela, c’est quoi ? Il manque des médecins, il manque des radiologues à l’hôpital… Le patient au final ne retient plus qu’un seul critère : la disponibilité du radiologue sur Doctolib. Aussi, il faut évoquer le manque d’attractivité médicale à l’hôpital : 50% des postes de radiologues hospitaliers ne sont pas pourvus. Il faut aussi mentionner qu’il y a des radiologues, chefs d’entreprise, qui s’occupent beaucoup plus de la gestion de leur société, que des patients. Le renouvellement des générations n’est pas non plus optimal. Les nouvelles générations de radiologues choisissent à 90% le salariat dans le libéral. Mais ne vont pas à l’hôpital, ils vont dans le libéral. Nous nous sommes dit qu’il serait intéressant que l’on réfléchisse ensemble, et non pas en opposant la radiologie libérale et la radiologie hospitalière.
Les nouvelles générations de radiologues choisissent à 90% le salariat dans le libéral
WUD. Quelles sont les solutions que vous proposez ?
D. S. Nous nous sommes dit qu’il y avait quelque chose à faire, pour améliorer l’accueil, pour réduire les délais, pour réduire le temps d’attente. Le radiologue doit être perçu comme un professionnel de santé au service des patients, alors qu’il l’est de moins en moins aujourd’hui. Nous avons créé le GIE Serenice pour cela, début octobre, juste avant les journées de la Société française de radiologie (SFR). Pourquoi Serenice ? Nous voulons que ce soit un label, une marque pour le grand public. Nous aurons réussi notre pari le jour où un patient choisira un cabinet Serenice pour Serenice. Nous avons constitué un ensemble de trois labels, auxquels devront se conformer les radiologues qui voudront nous rejoindre. Premier label : avoir du personnel de qualité et bien formé. Le cabinet qui veut nous rejoindre doit signer une charte pour se conformer à un certain nombre de règles concernant l’accueil « patients ».
D’ici quelques années, nous mettrons en place un contrôle qualité externe pour vérifier que la charte est bien appliquée. Deuxième label : le territoire. On veut proposer aux radiologues qui s’engagent à nos côtés de participer à des degrés divers à l’effort de permanence des soins. Dans le département de l’Isère, il reste trois radiologues, de plus de 65 ans, pour tout le département. Dans cinq ans, si on ne fait pas quelque chose, il faudra aller à Toulouse ou Agen pour prendre une radio. Au sein de Serenice, nous allons proposer de la téléradiologie, ou de la mise à disposition de vacation physique dans des endroits où il y en a besoin : nous allons proposer à des radiologues de se mettre à disposition du collectif. S'il y a 1000 radiologues dans trois ans qui rejoignent le réseau, nous aurons la possibilité d’offrir une couverture 24H/24 et 7 jours/7 dans toutes les spécialités ou sous-spécialités de la radiologie. Troisième volet : l’innovation, pas seulement technique mais aussi managériale, pour permettre une meilleure disponibilité du personnel au service du patient. La moyenne d’accès à une IRM actuellement est de 40 jours. Ces longs délais sont aussi la conséquence d’un flux qui n’est pas optimisé.
WUD. Quelle est la grande différence entre votre réseau et ceux qui existent d’ores et déjà ?
D. S. Il y a déjà deux réseaux qui existent. Ces deux réseaux sont dédiés au radiologues libéraux, dont l’un est très capitalistique et offre des portes de sortie pour les radiologues qui souhaitent partir à la retraite. À la différence de ces deux réseaux, nous intégrons les libéraux, mais aussi les hospitaliers, et les industriels. Deuxième originalité : nous sommes un groupement d’intérêt économique, nous ne sommes pas là pour faire de l’argent. Pour atteindre les objectifs de nos trois labels, nous allons nous appuyer sur un bouquet de services extrêmement large, qui va aller du système d’information en radiologie, du Pacss, du contrôle de gestion, des services de paie… Nous avons passé un accord avec KPMG pour importer des services dédiés à la radiologie, totalement externalisé, pour que le radiologue puisse se concentrer sur son cœur de métier.
Nous voulons accueillir à la fois les structures libérales mais aussi les radiologues hospitaliers
WUD. Quel rôle joue Nehs dans ce GIE ?
D. S. Nehs est dans le réseau, à hauteur de 40% uniquement. Mais Serenice est un outil qui appartient à 60% aux radiologues. Nous nous appuyons donc sur un bouquet de services extrêmement large, afin de libérer le médecin de toutes les taches non médicales. Nous avons aussi identifié une autre problématique : les jeunes radiologues. Il n’est pas normal que les jeunes professionnels de la radiologie choisissent à 90% le salariat libéral. Typiquement, nous nous sommes rapprochés d’associations de jeunes radiologues et nous allons leur proposer en partenariat avec la société française de radiologie, une formation sur les sujets liés à l’entreprise. Nous pensons que nous pouvons avoir une contribution intéressante sur ce sujet. En les intégrant dans une communauté de 1000 radiologues, en leur prodiguant une formation qu’ils n’ont pas reçue, ils auront plus de perspectives de choix.
WUD. Comment adhère-t-on à Serenice ?
D. S. Il existe un droit d’adhésion pour les structures de radiologie libérales, et une adhésion pour les professionnels de la radiologie, qu’ils soient libéraux ou hospitaliers. Pour les structures, le coût d’adhésion sera fonction du chiffre d’affaires, et il faut aussi compter sur une cotisation individuelle par radiologue. Nous voulons accueillir à la fois les structures libérales mais aussi les radiologues hospitaliers. Les hôpitaux ne pourront pas adhérer au GIE mais les radiologues, oui. Les internes sont accueillis gratuitement.