Article
C'est un livre pas comme les autres. Un livre qui parle des gens, du quotidien, de la paperasse, de la douleur, de l'émotion, de la maladie... Un recueil de chroniques dans lequel Fluorette parle de la vie...et de la mort. Celle contre laquelle on apprend à lutter depuis nos premières années de médecine, à coups d'intra-veineuses et d'hospitalisations, mais qu'on a tant de mal à assimiler. Si ce livre est troublant, c'est qu'il touche à la fois à l'intime et à l'universel. Sans user d'aucun artifice.
"Médecin est un beau métier"
On se retrouve sans mal dans la promenade de santé de Fluorette. Dans ce quotidien de généraliste, à la fois routinier et en perpétuel renouvellement. On se reconnaît aussi dans ses questionnements, ses agacements, ses joies, ses fiertés... Et ses regrets. Le regret, surtout, de ne pouvoir exercer une médecine idéale. C'est à dire une médecine humaine, plus prévenante et moins automatisée. La jeune médecin généraliste évoque aussi ses erreurs. Celle de demander à un jeune ado, nommé Ingell, si il a ses règles, et comprendre qu'il s'agit d'un garçon. Ou encore celle de ne pas avoir su annoncer la rechute d'un cancer à son patient. Trop éprouvant.
"Le sacerdoce, le dévouement, l'abnégation"
Des fois, Fluorette doûte, de sa capacité à tenir ce métier notamment. Peut-être aurait-elle du ouvrir un salon de thé, se demande-t-elle, un soir à 23h30 en rentrant chez elle d'un long dimanche d'astreinte, plutôt que de faire médecine. C'est ce dont elle a toujours rêvé, et puis, "la nuit, le salon de thé, c'est fermé" se dit-elle. Qui parmi nous, ne s'est jamais posé cette question ? D'ouvrir un salon de thé, un restaurant, de devenir fleuriste, artiste ou même menuisier... Bref, de faire un métier plus léger, moins dur, moins éreintant. Physiquement, et psychologiquement.
"Il reste encore beaucoup à faire"
Par son écriture sensible et saisissante, Fluorette donne un visage humain à notre profession, et tranche avec la vision paternaliste quasi-divine du "Docteur". Elle ne se prive pas, non plus, de critiquer les absurdités de notre formation, l'internat, l'URSSAF, les études de médecine, trop centrées sur les organes et l'Evidence Based Medecine. Et tellement éloignées de la réalité. En voici un extrait : "Certains viennent juste parler. Ils ressortent sans traitement, sans arrêt, sans projet thérapeutique. J'aime penser qu'ils ont eu l'oreille qu'ils étaient venus chercher. Mais ce n'est pas ce que j'ai appris à la fac. Et c'est difficile de ne pas se sentir inutile."
À What's up doc, on remercie Fluorette pour cet opus qui incarne avec tendresse la beauté et la richesse de notre métier ! À nous de le rendre, jour après jour, plus juste et plus humain. Pour nos patients. Et pour nous, aussi.
Promenade de santé : chroniques d'une jeune généraliste, par Fluorette. Editions Grasset, 16,90 €
Source:
Publié par AP