Numerus clausus : « C’est très bien d’être plus nombreux »

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Entretien avec Antoine Oudin, président de l’Anemf

Numerus clausus : « C’est très bien d’être plus nombreux »

L’augmentation du numerus clausus, décidée par la ministre de la Santé en novembre dernier, a laissé nombre d’observateurs pantois. Y compris les premiers concernés : les carabins. Le point sur leur positionnement avec Antoine Oudin, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf).


What’s up Doc. Dans une interview au Monde, le vice-président chargé des études médicales de l’Anemf se disait hier « 
inquiet » de l’augmentation du numerus clausus. Ce n’est pas une bonne nouvelle ?

Antoine Oudin. Que les choses soient claires : nous sommes pour l’augmentation du numerus clausus. Mais pas si la qualité de la formation des étudiants en pâtit. Il y a des étudiants qui se plaignent, encore aujourd’hui, d’avoir des stages où ils sont 20 dans un service. Or, l’augmentation du numerus clausus n’a pas été accompagnée d’une augmentation des moyens.

WUD. Quelles mesures seraient de nature à vous rassurer ?

AO. Nous pensons qu’il faut assumer les conséquences des décisions qui avaient été prises lors de la Grande conférence de santé au début de l’année dernière, et notamment la première d’entre elles : la régionalisation du numerus clausus. Chaque doyen doit proposer, en concertation avec les étudiants, un nombre de personnes qu’il peut accueillir. Ce nombre doit être en accord avec les capacités de formation de sa fac, avec la possibilité nouvelle de le réviser annuellement. Mais actuellement, dans certaines facs, nous assistons à des augmentations d’effectif de 20 à 40 %. Il faut soutenir les doyens qui font cet effort qui va être difficile à soutenir, au niveau local comme au niveau national. Nous restons donc vigilants, et prenons date dans un an pour évaluer les choses.

WUD. N’avez-vous pas l’impression que la question du numerus clausus, telle qu’elle est posée dans le débat public, est parfois instrumentalisée ?

AO. Il est clair que les gens manquent d’information sur le sujet. On ne se rend pas compte qu’avec le nouveau numerus clausus, on atteint aujourd’hui un chiffre jamais égalé. Tant mieux, on manque de médecins ! Mais le numerus clausus n’est qu’un paramètre, et si on veut le faire évoluer, il faut jouer sur l’ensemble du système. J’ai parlé des capacités de formation, mais il faut aussi accompagner les médecins qui s’installent, et imaginer à quoi ressemblera l’exercice avec des médecins plus nombreux qui se feront, dans une certaine mesure, concurrence.

WUD. La concurrence vous fait peur ?

AO. Non, il y en aura, et je ne veux pas être dans la caricature corporatiste en mode « il ne faut pas trop d’offre sinon on ne gagnera plus d’argent » ! Le message qu’on essaie de faire passer, c’est justement que c’est très bien d’être plus nombreux, car ça va nous permettre de réinventer le métier. Mais il ne faut pas réfléchir à l’avenir d‘une profession dans l’urgence, au moment où il y a une crise, et faire des réparations avec du scotch. On ne se rend pas suffisamment compte qu’on manque de souplesse, et qu’il faut du temps pour former les professionnels de santé. Nous alertons donc sur cette méthode qui consiste à augmenter les effectifs pour forcer la modification des pratiques, plutôt que l’inverse.

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Propos recueillis par Adrien Renaud

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