Libéral : La Cour des comptes étrille le secteur 2

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L’ordonnance de la rue Cambon

Libéral : La Cour des comptes étrille le secteur 2

Dans son rapport annuel sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, publié mercredi, la Cour des comptes recommande un conventionnement sélectif pour les libéraux. Sur l’organisation de l’offre de soins, elle dénonce le retard français sur la télé-médecine.

 

Ouf ! L’Objectif national de dépenses d'assurance maladie a été respecté « pour la septième année consécutive » explique la Cour des comptes dans son rapport annuel sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale. Mais là où les hospitaliers ont fait des économies - le déficit des établissements publics de santé s’est réduit de 606 millions d’euros en 2015 à 529 millions en 2016 - les dépenses de soins de ville ont dépassé l’objectif initial, puis celui rectifié à la hausse. La progression des dépenses a entre-autres été tirée par les honoraires des médecins spécialistes (+4,2 %).

 

Sus aux dépassements d’honoraires

 

Les magistrats de la rue Cambon pointent du doigt les dépenses de santé liées aux actes effectués par les 61 503 spécialistes libéraux qui « connaissent une progression plus rapide (+2,5 % en moyenne annuelle entre 2009 et 2015) que celle des généralistes (+0,6 %). » Le rapport rappelle qu’il y a en France, au 1er janvier 2016, 54 913 médecins spécialistes installés en cabinet : 30 453 relèvent du secteur 1 et 24 245 du secteur 2, « les autorisant à dépasser les tarifs opposables remboursables par l’assurance maladie ». Selon la Cour, les dépassements d’honoraires de ces derniers sont passés de 16,1 % en 2009 à 17,5 % en 2015 du montant total des dépenses présentées au remboursement.

 

« La médecine libérale de spécialité est essentielle à la prise en charge des patients en prévenant des recours non justifiés et coûteux à l’hôpital » reconnaissent les magistrats. Ils souhaitent néanmoins mettre en place de nouveaux outils pour « contenir la dynamique des dépenses et améliorer l’accès aux soins. » La Cour dénonce une sur-dotation de l’offre de médecine de spécialité notamment sur des zones urbaines qui « comportent alors une majorité de spécialistes de secteur 2 pratiquant des dépassements d’honoraires, ce qui affecte l’accès aux soins pour des raisons financières. »

 

« Un procès en sorcellerie fait aux spécialistes en secteur 2 » 

 

Mais pas d’inquiétudes, la Cour des comptes a des solutions en poche : « Le conventionnement de nouveaux médecins spécialistes devrait être subordonné à leur installation en secteur 1. Inversement, les médecins spécialistes en zone sous-dense garderaient la possibilité de s’installer en secteur 2, mais devraient alors intégrer obligatoirement l’option de pratique tarifaire maîtrisée. » Le conventionnement sélectif, il fallait oser.

 

Les syndicats libéraux n’ont pas tardé à réagir. La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) « invite la Cour des comptes à sortir de sa vision bureaucratique et à prendre en compte la réalité du terrain. » Elle regrette, dans un communiqué, « des mesures désincitatives pour les jeunes médecins qui s’installent aujourd’hui très peu en libéral. » Le Syndicat des médecins libéraux (SML) dénonce lui un « plaidoyer contre la médecine libérale » ainsi qu’un « procès en sorcellerie fait aux spécialistes en secteur 2 » et considère les propositions des magistrats comme « une étatisation pure et simple de la médecine de ville. »

 

La Cour dénonce « la lenteur du changement des pratiques »

 

Mais les libéraux ne sont pas la seule cible de la Cour. Prenant l’exemple de la chirurgie, « pratique en pleine évolution », le rapport pointe « la nécessité d’une meilleure organisation des soins » pour une meilleure prise en charge. Mais la Cour des comptes dénonce « la lenteur du changement des pratiques » qui freine le développement de la chirurgie ambulatoire, qui « reste inférieur à celui constaté chez nos voisins. »

 

Pour soulager et améliorer l’accès et l’organisation des spécialités chirurgicales, la Cour estime que la télé-médecine « peut constituer un levier majeur de réorganisation et d’efficience. » Mais  pour les magistrats de la rue Cambon, il y a du retard, et c’est un euphémisme : « Plus d’un quart de siècle après la première télé-consultation médicale, la télé-médecine demeure en France une pratique marginale, sans réel impact sur l’organisation du système de santé. » Ça c’est envoyé. À qui le tour ?

Source:

Thomas Moysan

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