Les généralistes, au cœur du dispositif vaccinal : Comment la machine va-t-elle se mettre en route ?

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Jean Castex l’a annoncé : le gouvernement souhaite mettre en place une stratégie vaccinale de « proximité ». Une ligne de conduire claire qui amène les médecins généralistes à se poser de nombreuses questions.
 

Les généralistes, au cœur du dispositif vaccinal : Comment la machine va-t-elle se mettre en route ?

« Proximité ». C’est l’un des trois maîtres mots qui devraient guider la stratégie vaccinale du gouvernement français selon Jean Castex. « Je crois profondément que la confiance passe d’abord par la place que nos professionnels de santé tiendront dans notre stratégie vaccinale », détaillait le Premier ministre le 3 décembre dernier. Et d’ajouter : « Il est souhaitable que le médecin généraliste soit au cœur de notre dispositif. […] Chacun doit pouvoir se faire vacciner par un professionnel de santé à côté de chez lui qu’il connaît et en qui il a confiance ». Une annonce grandiloquente accueillie avec prudence par les 52 000 médecins généralistes présents en France.

 
« Je voudrais que cette décision soit confirmée », lâche Jacques Battistoni, président du syndicat MG France, qui confie être trop habitué aux « déclarations d’amour » qui ne sont pas suivies d’actes dans les projets de loi Santé. « Les médecins généralistes jugeront sur les actions, et pas sur les déclarations d’intention. Et notamment, voir si Jean Castex propose de façon concrète la manière d’associer les médecins généralistes à la vaccination et au suivi des patients », ajoute-t-il, la veille du discours de l’énarque. Au-delà d’administrer le vaccin à ses patients, Jacques Battistoni rappelle, en effet, la nécessité de mettre en place un accompagnement des patients dans le cadre de cette campagne de vaccination à grande échelle.  « Notre rôle principal est de les conseiller, de les informer, de prendre une décision partagée avec eux autour de la nécessité ou pas de se faire vacciner », indique le docteur qui confie avoir demandé, avec plusieurs représentants d’organisations syndicales, l’organisation de consultation pré-vaccinale notamment « pour les personnes les plus vulnérables ». « On pense que c’est une bonne idée. On va devoir parfois délivrer des conseils spécifiques en fonction des populations », indique Jacques Battistoni. Et d’ajouter : « On va avoir un temps d’information et de conviction nécessaire à faire auprès des patients pour leur expliquer quel vaccin on leur administre et comment cela fonctionne ».
 
Un accompagnement sur lequel semble compter le gouvernement pour éviter le fiasco du vaccin contre la grippe H1-N1 qui s’administrait alors sans le suivi des médecins généralistes. Pour rappel, la France n’avait pu vacciner que 8,5 % de la population. « L’erreur a été d’écarter les médecins libéraux », estimait, à l’époque pour Le Point le président de la Commission d’Enquête, Christophe Lagarde. Une conviction également portée par Jacques Battistoni qui insiste sur l’importance de communiquer aux médecins généralistes les éléments d’expertise qui entourent ces vaccins. « Est-ce qu’ils doivent se faire vacciner s’ils ont déjà été positifs ? Combien de temps dure l’immunité du vaccin ? Est-ce que ce vaccin, non content de nous protéger, évite aussi de contaminer les autres ? », énumère le Président de MG France. Et d’ajouter : « Les médecins convaincront la population s’ils sont convaincus eux-mêmes que ça a un intérêt en matière de santé ».
 
Outre la question de l’accompagnement, celle de l’organisation est également dans tous les esprits. S’ils attendent que les difficultés techniques comme l’approvisionnement, la conservation des doses et la répartition soient solutionnées par l’État, les médecins généralistes souhaitent avoir la main sur l’organisation de terrain, qui devra se faire de concert avec les collectivités territoriales selon Jacques Battistoni. « Je parle d’organisation locale parce que les médecins souhaitant qu’on mutualise nos efforts. On a besoin que les Mairies nous mettent des locaux à disposition par exemple », indique le Président de MG France. Difficile, en effet, d’imaginer que toutes les vaccinations pourront se faire facilement entre les quatre murs des cabinets médicaux. « Comme ce sont des vaccins multidoses, la difficulté est d’anticiper et de savoir combien on va en faire dans la journée. En plus, ils se périment en quelques jours », détaille le docteur. Un ensemble de facteurs qui fait pencher la balance, selon lui, vers  la mutualisation des moyens. « Il n’y pas de modèle de vaccination unique. Ça dépendra des territoires, mais on plaide plutôt pour des cabinets de groupe d’organisation locale pour éviter de gâcher des doses », indique le Président, qui souligne que des centres dédiés au Covid ont déjà été déployés sur le territoire, notamment pour faire des tests antigéniques.  « Demain, ça peut devenir des centres de vaccination », ajoute Jacques Battistoni. Une organisation méticuleuse qui devra également s’appuyer sur un système permettant le suivi de la vaccination multi-doses des patients. « Il faut qu’un médecin, qui ne serait pas le vaccinateur initial, puisse savoir quelle solution a déjà été administrée », souligne Jacques Battistoni. Un système qui pourrait également permettre de faciliter les relances.
 
Enfin, la question de la rémunération des médecins vaccinateurs doit être posée. « Cela fait partie des questions sur lesquelles nous allons discuter avec l’Assurance maladie », indique le Président. De nombreuses questions en suspens qui, il l’espère, trouveront des réponses, ce soir, lors de l’allocution de Jean Castex.
 

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