
Vincent Macaigne et Isaach de Bankolé dans Muganga, biopic de la vie du Dr Denis Mukwege.
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Une ode au courage d'un homme d'exception, mais aussi à la réparation psychique, processus qui peut prendre tant de formes, tant de chemins, qui échappe à toute dimension normative ou quantifiable, et qui repose avant tout sur la constance de deux ingrédients : l'accompagnement et l'espoir.
Il est des sujets qui se prêtent difficilement à la fictionnalisation. Mais il est aussi des histoires qu'il est vital de raconter pour qu'elles échappent à la condamnation de n'être que silence, ou hurlement. Celle qu'a choisie de filmer Marie-Hélène Roux pour son premier film aura mis dix ans à trouver le chemin des salles. Dix ans qui ne sont pourtant rien face à la trajectoire de ce médecin congolais qui n'a jamais renoncé à porter la voix de ces femmes mutilées et traumatisées, des récits terribles qui se retrouvent dans ce film-ci comme autant de lames de poignard fichées dans l'âme humaine mais qui au final, par un tissage progressif et pudique, sont comme des graines d'espoir que l'on a vues, pendant cette centaine de minutes, germer.
Muganga est un double hymne à l'acte chirurgical et au soutien psychologique
Il est des démarches que la sincérité immunise, contre l'obscénité ou le simplisme. Muganga est un film qui sait constamment montrer quand et comme il le faut ces corps saccagés et ces paroles dévastées, en un double hymne à l'acte chirurgical et au soutien psychologique. C'est un film sur un homme exceptionnel mais qui n'est jamais sanctifié, tout pétri de foi qu'il est - et ô combien il en eût fallu pour quiconque aurait eu à accueillir l'étendue de cette souffrance-ci. C'est, enfin, et peu à peu, surtout le film de Blanche, de Patience, d'Antoinette et de toutes les autres qui, en s'unissant pour acheter le billet retour et exiger la mise sous protection de "leur" muganga, deviennent actrices de leur parcours. Ce qui pourrait être vu, sous notre prisme occidental, comme de la dépendance est ainsi son exact contraire : c'est parce qu'elles ont bénéficié d'une présence indéfectible que ces femmes ont retrouvé le chemin de l'autonomie.
https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/dr-denis-mukwege-un-film-sur-son-combat
La salle, au diapason de l’écran, alterne entre silence de mort et larmes chaudes d’espérance. En ces temps où tout est remis en cause, et souvent pour bien peu, on avoue que cela fait du bien.