En chirurgie plastique et esthétique, il faut savoir parler risque et reprise

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465 cas : c'est le nombre de reprises chirurgicales recensées dans, les dossiers de sinistralité entre 2002 et 2014 par le Cabinet Branchet pour les chirurgiens plasticiens couverts par l'assureur, soit 15% des sinistres déclarés.

En chirurgie plastique et esthétique, il faut savoir parler risque et reprise

COMMENT BIEN ANTICIPER AVANT MÊME D’OPÉRER ?

Pour Jean-Pierre Reynaud, chirurgien plasticien et médecin expert travaillant dans le cabinet Branchet, cela ne fait aucun doute, « l'éventualité d'une reprise chirurgicale doit être annoncée dès le début ».

Fort de ses 38 années d'expérience en chirurgie plastique et esthétique libérale, il le clame haut et fort : « il faut toujours, avant de s’engager dans les actes, expliquer la possibilité d'une "retouche", de complications potentielles et de leur traitement ». C'est pourquoi il est primordial de délivrer l’information la plus complète possible dès les premiers entretiens avec le patient. « Ainsi bien expliquées, en cas de déconvenues, ces éventualités sont toujours mieux acceptées par des esprits préparés et mieux vécues par les médecins eux-mêmes ».

La reprise chirurgicale n’est pas toujours synonyme de complication. C’est vrai en particulier dans l’esthétique. « Dans des cas de rhinoplastie, on complète le geste initial une fois sur quatre. La technique est bien maîtrisée, ça n’est pas le problème ni la raison de la reprise, mais la cicatrisation, elle, reste parfois imprévisible. Les réactions tissulaires ne sont pas les mêmes pour tous les patients et très variables selon les terrains, l’âge, la qualité de la peau… »

ET SI, MALGRÉ TOUT, LA COMPLICATION ARRIVE…

L'accompagnement du patient en cas de problème tient un rôle primordial dans la relation. Le patient ne doit pas se sentir seul. Jamais. De nombreuses plaintes sont issues d’un défaut de communication. Pour Jean-Pierre, surtout en libéral et particulièrement en chirurgie plastique et esthétique où les patients attendent un objectif de qualité : « il faut savoir rester toujours joignable, soit directement, soit par sa structure de soin. Sinon, c’est la porte ouverte aux quiproquos, et le patient finit nécessairement par s’adresser à l’urgentiste le plus proche ou à son généraliste ». Des situations qui conduisent parfois à une escalade de préjudices subis et à une impasse judiciaire.

En cas de complication ou d’évolution inattendue, il faut être réactif, consigner les éléments dans le dossier médical, parfois prendre des photos pour nourrir d’arguments complémentaires, être pédagogue, proche des patients, compréhensif et prêt à la reprise si nécessaire.

TARIFICATION EN LIBÉRAL : RETOUCHES « ALL INCLUSIVE » ?

Si l’on considère toujours l’exemple particulier de la chirurgie plastique, pour des actes d’esthétique – donc non conventionnés – le devis originel proposé au patient doit tenir compte du suivi post-op'. Les pratiques sont très différentes en fonction des chirurgiens. Il n’existe pas de règle. On note cependant que « souvent, le devis initial est prévu avec une période de soins d'environ 1 mois ». Jean-Pierre Reynaud, lui, a choisi « six mois de suivi » inclus dans le tarif initial, ce qui permet d’envisager sereinement pour les patients et le thérapeute les éventuelles reprises à moyen terme sans nouvelle facturation.

Quoi qu’il en soit, en cas de nécessité de recours à une nouvelle intervention, hors « période de soins » prévue à l’origine, il ne faut pas oublier de produire un nouveau devis. « Une cicatrice un peu élargie  va nécessiter une reprise minime alors que le repositionnement de prothèses mammaire entraînera un geste plus chronophage, plus complexe, plus onéreux de fait » explique Jean-Pierre. D’où l’intérêt de toujours être très vigilant à l’annonce initiale de la prise en charge car personne n’est à l’abri d’une complication après un premier geste. Le raccourci qui consisterait à idéaliser un suivi théorique sans problème pour favoriser l’adhésion d’un patient à un projet médical présenté en consultation est à proscrire. Si, certes, ce principe peut l’amener à s’engager plus facilement dans le parcours de soins proposé, il risque d’être d’autant plus vindicatif en cas de coup dur et côté thérapeute, on se sent alors sans recours faute d’avoir clairement évoqué les risques encourus.

SE COUVRIR AVEC UNE NOUVELLE ASSURANCE

Depuis peu, pour des actes non conventionnés comme en chirurgie esthétique, la mise en place d’un contrat d’assurance pour les praticiens destiné à prendre en charge en partie le coût de la reprise chirurgicale est en cours d’élaboration. Ce contrat, comme l'explique Caroline Brillet, responsable juridique au Cabinet Branchet, fait figure de petit nouveau. Il ira plus loin qu'une assurance responsabilité civile professionnelle.

« Il fonctionnera pour une simple complication ou une insatisfaction du client, qu’il y ait faute ou non du praticien ». La garantie sera automatiquement déclenchée et couvrira les frais de reprise auprès de l'établissement de santé, du chir’ et de l’anesthésiste, ce qui ne serait donc pas à la charge du patient, ou de la RCP en cas de faute. Finalement il s’agirait d’une forme de forfaitisation des actes via les assurances…

BREAKING NEWS*
Un chirurgien plasticien est mis en cause en moyenne tous les 2 ans et 5 mois contre 3 ans et 5 mois pour les autres praticiens libéraux.
Les déclarations des patients sont effectuées en moyenne 2,5 ans après l'acte chirurgical.
En chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique, la fréquence des mises en cause est principalement  due à l'insatisfaction des résultats obtenus.

Article réalisé avec le soutien du Cabinet Branchet

Source:

*Cartographie des risques opératoires en chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique - Bilan 2013 réalisé par le Cabinet Branchet en partenariat avec Asspro (Association de prévention du risque opératoire) portant sur l'ensemble des dossiers de sinistres déclarés entre 2008 et 2012.

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