Comment mieux prendre en considération la question du sexe et du genre en santé ?

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Sexe, genre… Un rapport de la HAS revient sur ces thématiques délaissées du système de santé. L’occasion de formuler un ensemble de recommandations pour aider à mieux les prendre en considération.
 

Comment mieux prendre en considération la question du sexe et du genre en santé ?

« Les différences entre les sexes sont nombreuses, insuffisamment documentées, trop souvent ignorées, et parfois sources d’iniquités en santé ». C’est par ces mots que la Haute Autorité de la Santé a choisi de débuter son analyse prospective annuelle sur le système de santé français portant sur la prise en considération du sexe et du genre en santé. Une conviction qui l’a poussée à formuler un ensemble de recommandations. « Des efforts doivent être entrepris pour que sexe et genre soient mieux intégrés, tant dans les stratégies de santé publique que dans leur déclinaison opérationnelle », assure la HAS.

Car selon l’Institution, la question du sexe et du genre en santé influe sur un grand panel de thématiques. « Des différences de morbi-mortalités et des comportements plus ou moins à risque », « des spécificités sexuées sur le plan médical », « des besoins particuliers non considérés […] des personnes en situation de handicap ou âgées », énumère de manière non-exhaustive la HAS.  Un rayonnement qui n’empêche pas le sexe et le genre d’être souvent relégué au second plan dans le parcours de soin de certains patients. « Ce sont des questions souvent délaissées en médecine », assure Thibaut Jedrzejewski, médecin généraliste au Centre de santé sexuelle-CeGIDD, le 190, tout de même témoin d’un frémissement de prise de conscience dans les rangs des acteurs de la santé cette dernière décennie.

Pour permettre au sexe et au genre d’être mieux pris en compte dans le système de santé, la HAS encourage la prise de conscience de ses différents acteurs. « L’amélioration de la santé globale passe par la prise de conscience que la santé des femmes ne se limite pas aux questions reproductives ; que la surmortalité des hommes jusqu’à 65 ans ne doit pas être considérée comme une fatalité ; que la santé des personnes intersexes ne se limite pas aux opérations d’assignation de sexe ; et que la santé des personnes trans ne se limite pas aux questions de changement de sexe », énumère l’Institution.

Un changement de perspective qui pourrait se répercuter dans des politiques publiques de santé. « Des mesures spécifiques et/ou une accentuation des moyens vis-à-vis de certains groupes doivent pouvoir être déployées lorsque c’est pertinent et utile. Ce qui implique de définir une nouvelle forme d’universalité des politiques de santé qui ne nie pas les différences, notamment celles liées au sexe et au genre », assure la HAS. Une opinion partagée par le médecin généraliste du 190 qui ajoute : « La prise en considération des différences de genre et de sexe a tardé car nous venons d’une médecine universaliste. On a voulu soigner tout le monde de manière égalitaire, sans faire de différence en fonction du sexe, du genre ou même de leur orientation sexuelle ».

Autre levier à actionner : la démocratisation de l’utilisation des données de santé liées au genre et au sexe dans les essais cliniques sur les produits de santé et les actes médicaux. « La HAS préconise que ces différences soient considérées à toutes les étapes de construction d’un projet de recherche », indique l’Institution. Une ligne de conduite qui doit être soutenue par l’analyse des données récoltées « au-delà d’une simple présentation en deux colonnes (femmes-hommes) ». « Dans les études qui sortent aujourd’hui, ce n’est absolument pas systématique que le biais du genre et du sexe soit pris en compte. », assure Thibaut Jedrzejewski.

Un travail d’ampleur qui doit commencer dès les bancs de l’école. « La lutte contre les stéréotypes à l’œuvre dans les pratiques professionnelles doit commencer par la formation initiale », indique la HAS. Et le médecin généraliste de commenter : « Tout est un peu complémentaire et synergique ». Un grand chantier annoncé qui reste pourtant, pour l’heure, sur le papier.

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