
I feel fine de Hailey et Austin Spicer.
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I feel fine est de ces films qui, à force d'osciller entre deux objectifs, ne les atteint ni l'un ni l'autre.
Dès les premières scènes de ce premier long métrage - qui aurait aussi bien, voire mieux, pu être un court - l'on sent deux ambitions au travail. Ou plutôt, celle qui devrait être accessoire - un goût pour le formalisme rétro et intemporel des teenage movies à l'américaine, en témoigne la présence au casting d'acteurs rescapés de séries télé des années 90 - prend d'emblée beaucoup trop le pas sur ce qui constituera peu à peu le coeur du film : la description d'une souffrance psychique et de la façon dont l'entourage tente de l'accompagner et de s'y adapter.
« Un film encombré de dialogues interminables et hors sujet... »
Il faut effectivement attendre un bon premier tiers de ce film encombré de dialogues interminables et hors sujet pour que la problématique apparaisse clairement : Ozzy présente un trouble dont le paradoxe réside dans le fait que, bien que suicidaire, il ne soit aucunement déprimé - ce n'est pas si paradoxal, la situation est d'ailleurs fréquente, et dans bon nombre de tableaux cliniques. Il s'agirait plutôt de dire qu'Ozzy tente de se suicider alors qu'il ne le souhaite pas. Contrairement aux phobies d'impulsion, où le passage à l'acte est craint mais jamais réalisé, Ozzy présente des obsessions idéatives aboutissant au besoin à la fois de les éviter et de vérifier, pour se rassurer, jusqu'où il peut aller. Ce phénomène existe dans des formes complexes de TOC, d'une complexité d'ailleurs peut-être trop grande pour qu'un film présentant tant de limites scénaristiques puisse la retranscrire. Et c'est finalement au niveau psycho-éducatif qu'il achoppe également, égrenant des séquences d'entretiens médicaux où l'on se contente d'augmenter des traitements et de psychothérapie expédiée en deux coups de cuillère à pot, alors qu'elles auraient pu être l'occasion d'une exposition un tant soit peu plus détaillée et éclairante des enjeux cliniques et thérapeutiques.
En résulte un film d'atmosphère qui voudrait s'inscrire dans un paysage balisé, et qui y réussit partiellement grâce à la beauté de ses paysages et de sa musique, tout en mettant en avant de façon assez brouillonne une pathologie qui, plutôt que d'être explicitée voire pédagogique - oui, des thérapies existent et fonctionnent - est incorporée dans un shaker de références pour aboutir à un cocktail fatal à la Love Story. Pour la prévention, on repassera.