Les médecins et soignants libéraux à bout de souffle, encore des chiffres qui accablent

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Stress chronique, épuisement émotionnel, douleurs physiques et sentiment d’abandon : telle est la réalité décrite par les plus de 3 000 répondants de l’enquête menée par Doctolib, l'association Soins aux Professionnels de la Santé (SPS) et Grenoble École de Management. Cette photographie sans filtre de la santé des professionnels de santé libéraux confirme un mal-être structurel.

Les médecins et soignants libéraux à bout de souffle, encore des chiffres qui accablent

© Midjourney x What's up Doc

Une santé mentale fragilisée chez deux soignants sur trois

L’un des premiers enseignements de cette enquête est sans appel : 66 % des répondants se déclarent souvent ou très souvent stressés dans leur exercice quotidien. Ce stress chronique s’accompagne d’un épuisement émotionnel chez 57 % des professionnels, de troubles du sommeil fréquents pour 27 % d’entre eux, et de pensées suicidaires au cours de leur carrière pour près de 1 soignant sur 5.

À cela s’ajoute un sentiment d’isolement, de solitude dans l’exercice, et un manque de recours lorsqu’un professionnel va mal. De nombreux témoignages soulignent une charge mentale démesurée et l’impression de ne jamais pouvoir décrocher.

Des douleurs physiques et une fatigue chronique

Les troubles somatiques sont également très répandus :
– 58 % évoquent une fatigue physique importante
– 49 % souffrent de douleurs chroniques (cervicales, dorsales, articulaires)
– Beaucoup déclarent ne pas consulter, même lorsqu’ils en ressentent le besoin

Ces douleurs sont renforcées par l’enchaînement des journées, les postures contraignantes, et l’absence de temps réservé à leur propre santé.

Un temps de travail démesuré

L’organisation du temps est une difficulté centrale :
– 77 % travaillent plus de 40 h par semaine, dont 25 % au-delà de 60 heures
– 72 % estiment ne pas avoir assez de temps pour leur entourage
– Et 50 % n’ont jamais de pauses régulières dans leur journée

Ce surinvestissement professionnel, combiné à l’isolement structurel du libéral, contribue à une forme de dérive sacrificielle, où l’on néglige sa propre santé au nom du soin.

Des freins puissants à la prise en charge de soi

Plus de 76 % des soignants reconnaissent ne pas consulter lorsqu’ils en auraient besoin. Pourquoi ?

– Par manque de temps
– Par difficulté à s’identifier comme patient
– Par crainte du jugement des confrères
– Ou encore par peur de la stigmatisation, en particulier en santé mentale

Des besoins clairs et massifs

Les répondants expriment des attentes fortes :
– 84 % souhaitent un accompagnement psychologique dédié aux soignants libéraux
– 78 % aimeraient un temps médical fléché pour leur propre suivi
– 74 % demandent un système de remplacement fiable pour permettre de s’absenter sans culpabilité
– Et 61 % plébiscitent des groupes de parole entre pairs

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/dr-clement-duret-medecins-soignants-vous-avez-le-droit-daller-mal-nayez-pas-peur-de-venir

Focus : les médecins libéraux en première ligne

Les médecins représentent environ 24 % des répondants à l’enquête. Ils sont majoritairement généralistes, mais aussi spécialistes ou médecins à exercice mixte.

Parmi eux :
– 25 % des généralistes déclarent un fort épuisement émotionnel, contre 14 % des spécialistes
– Plusieurs témoignages soulignent l’isolement du médecin seul en cabinet, l’impossibilité de prendre un congé ou de s’arrêter, et le manque de relais en cas de fatigue
– Les médecins expriment un sentiment d’abandon, malgré leur rôle central dans le système de soins

Comme les autres soignants libéraux, ils consultent rarement pour eux-mêmes, par manque de temps ou par peur de franchir la barrière soignant/soigné.

Enquête réalisée en ligne en mars 2025 sur un échantillon de 3 128 professionnels de santé libéraux, toutes professions confondues (médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, sages-femmes, dentistes, orthophonistes, orthoptistes…). Le panel est composé de : 43 % d’infirmiers libéraux, 24 % de médecins généralistes, 7 % de sages-femmes, 6 % de kinésithérapeutes, 5 % de chirurgiens-dentistes, Et d'autres professionnels de santé libéraux.
Parmi les répondants, 85 % sont des femmes et 60 % ont moins de 50 ans.
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