Les hôpitaux français à l'heure de la transition écologique… quel défi !

Article Article

Le secteur de la santé serait responsable de 8 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Pour accélérer la transition écologique des établissements de santé, l'État a mis en place un réseau de conseillers chargés de réaliser des audits et de guider les hôpitaux pour remplir l’objectif de réduire leur facture d'énergie et leurs émissions de CO2.  

Les hôpitaux français à l'heure de la transition écologique… quel défi !

© IStock

Un rapport du think tank The Shift Project, publié en 2021, révélait que le secteur de la santé serait responsable de 46 millions de tonnes de CO2 chaque année, soit environ 8 % des émissions françaises. Le défi que représente la réduction de l'empreinte carbone des hôpitaux s'ajoute, bien entendu, aux crises importantes que vit déjà le secteur : pénurie de soignants, financements en berne… La transition écologique reste pourtant une nécessité, y compris pour les établissements de santé, afin que la France puisse atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050.

À la suite du Ségur de la santé de juillet 2020, un réseau de conseillers en transition énergétique et écologique en santé (CTEES) a donc été créé : 150 conseillers et une quinzaine de coordinateurs régionaux sont chargés d'assurer le fonctionnement du réseau. Leur mission ? Accompagner les établissements de santé « dans l'élaboration et la mise en œuvre d'une gestion planifiée de l'énergie ».

« L'écrasante majorité [des établissements] fonctionne aux énergies fossiles »

La première opération réalisée par les conseillers est d'identifier les sources de consommation, sources de consommation dont les établissements n'ont d'ailleurs pas toujours conscience. Le premier constat que fait Christian Hilss, qui travaille comme CTEES depuis septembre 2022, c'est que « l'écrasante majorité fonctionne au gaz et aux énergies fossiles ». Faire un audit et trouver les équipements et les éléments les plus énergivores est donc la priorité. D'autant que, depuis la loi du 17 août 2015, les établissements à usage tertiaire de plus de 1000 m² ont désormais l'obligation légale de réduire de 40 % leur consommation d'énergie d'ici à 2030 et de 60 % en 2050.

Cet effort concerne d'ailleurs aussi les établissements de santé les plus récents. « Avec la climatisation et la ventilation à double flux, un site neuf est souvent très énergivore », explique Sylvain Gable, directeur des services techniques et sécurité de l'hôpital Nord Franche-Comté, inauguré en 2017. Avec une surface pourtant plus petite par rapport aux anciens locaux, la facture d'énergie de l'hôpital franc-comtois n'a pas bougé d'un iota depuis la rénovation : 1,5 million d'euros. Parmi les mesures prises grâce aux conseils des CTEES pour faire baisser les coûts, on retrouve l'installation de chaudières biomasses ou encore des coupures ciblées dans des pièces non utilisées. Des pratiques plus écologiques qui ont permis de faire économiser près d'un million d'euros à l'établissement.

Les 50 propositions de la FHF pour réduire la facture carbone du secteur

De son côté, la Fédération hospitalière de France (FHF) travaille également à réduire l'empreinte carbone du secteur. Elle a créé, l'année dernière, un comité spécifique dédié à la « transition écologique en santé ». Les trois missions de ce nouveau comité sont de produire des propositions concrètes à destination des pouvoirs publics, d'accompagner la transition des établissements et de valoriser au niveau national les actions des hôpitaux en matière écologique.

Cette nouvelle organisation s'inscrit dans la continuité du travail de la FHF, qui avait déjà publié en septembre 2020 cinquante propositions pour « soutenir la transition écologique du système de santé ». Parmi celles-ci, on retrouve l'aide à l'achat de véhicules propres ou encore la diminution des emballages et des produits jetables à usage unique.

Si toutes ces propositions et mesures vont évidemment dans le bon sens, elles se heurtent néanmoins à plusieurs freins importants. Tout d'abord, une bonne partie des émissions sont liées à la production de médicaments, qui sont majoritairement élaborés en Asie. Leur transport pèse donc lourd dans la facture carbone du secteur. Il en va de même pour les packagings et une partie des équipements sanitaires.

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/le-chirurgien-qui-voulait-rendre-les-blocs-moins-polluants

Mais l'obstacle majeur vient du manque de financement. Dans une note publiée le 5 janvier 2023 et adressée au ministre de la Santé, de hauts fonctionnaires du réseau Le Lierre regrettent « l'absence de financements ciblés ou dédiés [à la transition écologique] » ainsi que le « déficit de prise en compte de la transformation écologique dans la gouvernance des établissements ». Ils insistent, eux aussi, sur le « bilan carbone désastreux » lié à la production de médicaments en dehors des frontières de l'Europe. Malgré toute la bonne volonté des établissements de santé, ils ne pourront donc sans doute pas relever seul le défi de la transition énergétique.

Raphaël Lichten

Découvrez le JIM 

 

Par JIM

Les gros dossiers

+ De gros dossiers