Le management selon Desgrandchamps

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Welcome to the promised land

Le management selon Desgrandchamps

Dans de nombreux services, la guerre s’est installée entre externes et internes, internes et assistants, PH et chefferie, ou même en mode battle royal avec l'administration en special guest. Mais dans celui du Pr Desgrandchamps, la paix semble régner. Quel est son secret ?

 

Le service d’urologie du Pr François Desgrandchamps, à Saint-Louis (AP-HP), jouit d’une réputation rare : celle d’un service où le personnel vit bien. Les taux d’absentéisme et de rotation des équipes sont au plus bas. Quel est son secret ?

 

Cette qualité de vie au travail est dans l’ADN du service légué par le Pr Alain Leduc, avec lequel il a travaillé depuis l’internat jusqu’au moment où il a pris la relève, explique-t-il. « M. Leduc nous a élevés – et je reproduis sa manière de travailler – dans le respect de chacun : médecins, infirmières et infirmiers, secrétaires… »

 

Service désarmé

 

Aucun excès d’autorité, même sur les horaires. « Il n’y a pas besoin de militariser, la preuve : tout le monde arrive à l’heure », poursuit-il. Une règle d’or : « Les cris sont inenvisageables ». Difficile à imaginer pour certains services ou l’agitation et les invectives sont courantes.

 

L’urologue note cependant une légère dégradation dans l’ambiance Bisounours de ce service, qu’il attribue à la pression administrative grandissante, aux restrictions budgétaires et aux fermetures de lits. « Pour la première fois en trente ans, il y a deux semaines, j’ai entendu des éclats de voix dans mon service », regrette-t-il.

 

L’ingérence administrative dans le fonctionnement du service, il la dénonce lui-aussi. « Je connais le monde militaire et un colonel de l’armée française m’a dit un jour ²Quand mes gens montent au front, ils n’y vont pas pour le drapeau ou pour la patrie : ils y vont pour moi². À mon avis, on travaille toujours pour quelqu’un. Mais désormais, l’organisation hospitalière fait qu’on ne travaille plus pour le chef de service, mais pour le directeur de l’hôpital… »

 

« Une chimie délicate »

 

Pour résumer sa pensée, le management hospitalier tient à deux choses : respect et bienveillance. Même s’il a suivi la formation de l’École de management des médecins des hôpitaux (EMAMH), François Desgrandchamps ne pense pas que cela s’apprenne. Pour lui, l’EMAMH sert à apprendre le langage administratif mais pour le reste, la mission d’un médecin est d’être le meilleur possible dans les soins. Celle de l’administration est de l’aider dans cette mission. Et non l’inverse comme c’est de plus en plus le cas.

 

Ensuite, pour gérer un service, « c’est une chimie délicate ». Le Pr Desgrandchamps semble l’avoir trouvée, mais surtout avoir été formé à son insu par un mentor en avance sur son temps sur les questions de management. Il profite aussi peut-être de la notoriété de son service, qui l’autorise à refuser les professionnels qui ne rentreraient pas dans le moule et qui risqueraient de casser cet équilibre fragile.

Source:

Jonathan Herchkovitch

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