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C'est en terrain connu que le candidat divers gauche (DVG) arrive jeudi matin sur l'un des plus grands marchés du département, à Monsemprom-Libos, bourg de 2.000 habitants près de Fumel, dans la 3e circonscription. Sous un parapluie, il serre des mains, souvent âgées, entouré d'élus locaux restés fidèles.
"Il a payé sa dette", juge José Rodriguez, 52 ans, marchand de fruits et légumes. "Tout le monde a droit à une seconde chance (...) J'étais très content quand il était maire de Villeneuve-sur-Lot. Je ne sais pas encore si je vais voter pour lui mais c'est une éventualité."
Jérôme Cahuzac, 72 ans, avait amorcé son retour dans l'arène depuis l'automne, avec quelques réunions publiques dans le département, affirmant alors ne rien s'interdire.
Le 9 juin au soir, il lui a fallu moins de deux heures, après le discours d'Emmanuel Macron annonçant la dissolution de l'Assemblée nationale, pour en "tirer les conséquences politiques" et se lancer dans la course.
"C'est un vrai plaisir de retrouver ces hommes, ces femmes, ces amis. Avec l'impression que la dernière fois que l'on s'est vu, c'était hier", estime l'ancien ministre du Budget de François Hollande.
Il avait démissionné en 2013 après des révélations de Mediapart, avant d'être condamné en 2018 pour fraude fiscale à quatre ans de prison, donc deux avec sursis, et cinq ans d'inéligibilité peine purgée aujourd'hui qu'il n'aime pas voir évoquée.
"J'ai trouvé une situation finalement assez comparable à celle que j'avais laissée, sur beaucoup de sujets. Je reviens donc d'abord pour finir le travail", ajoute-t-il.
Un discours que le maire LR de Villeneuve, Guillaume Lepers, l'un de ses adversaires, juge "insultant" pour ceux qui "se démènent sur ce territoire", fustigeant un candidat "du passé".
Des avis partagés dans un endroit ou l'ex député n'a pas laissé de bons souvenirs
Sur un autre marché à Blanquefort-sur-Briolance, dont la maire Sophie Gargowitsch s'est engagée comme suppléante de Jérôme Cahuzac, un métallurgiste à la retraite vient le saluer.
"C'est grâce à lui que l'on a obtenu le plan amiante pour les salariés de l'usine de Fumel, j'ai pu partir avant de choper une cochonnerie (...) Il n'a rien volé à personne, à partir de là il peut revenir et comptez sur moi, je vais voter pour lui", promet le septuagénaire.
La fermeture en 2018 de cette usine, installée depuis 1847 et qui a employé jusqu'à 3.500 salariés, a été un coup de tonnerre dans ce territoire désindustrialisé. Où l'ex-député n'a pas laissé que de bons souvenirs.
"Il a été pris les doigts dans le pot de confiture, qu'il dégage!", balaie Gilles Ballu, fromager de 56 ans. "Ce qui m'étonne, c'est qu'il pense qu'on peut encore lui faire confiance. Il est allé très loin dans le mensonge", relève Monique Nicolas, retraitée de 76 ans, "choquée" que des élus locaux le soutiennent.
Comme Didier Caminade, président de la communauté de communes de Fumel, "gaulliste non encarté" pour qui Jérôme Cahuzac "peut prendre des voix un peu partout".
Celui-ci affronte principalement, outre Guillaume Lepers, la députée sortante RN Annick Cousin et Xavier Czapla pour le Nouveau Front populaire (NFP).
Entre "ces deux extrêmes", il mise sur un groupe "de centre gauche, social-démocrate" pour siéger à l'Assemblée. Sa suppléante le croit même "suffisamment à l'aise pour créer un nouveau groupe de gauche humaniste".
"Il est Macron compatible", souligne le candidat du NFP, alors que la majorité présidentielle n'a investi personne dans cette circonscription où la liste Bardella a obtenu 38% des voix aux européennes.
La représentante du RN, elle, attaque Cahuzac sur les "valeurs": "Quand il était ministre et fraudait le fisc, je travaillais de nuit dans un hôpital psychiatrique pour 1 300 euros par mois", cingle Mme Cousin.
Que la candidature Cahuzac pourrait "peut-être aider, sans le vouloir", estime Monique, la retraitée.
Avec AFP