Italie : inquiétude sur le droit à l’IVG après la victoire des « postfascistes »

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La future présidente du conseil italien Giorgia Meloni ne cache pas son opposition à l’avortement.

Italie : inquiétude sur le droit à l’IVG après la victoire des « postfascistes »

© IStock

« Dieu, patrie, famille ». Le slogan favori de Giorgia Meloni, chef de file du parti d’extrême-droite italien Fratelli d’Italia arrivé en tête des élections législatives de dimanche, ne laisse pas trop de doute sur son orientation politique. Si les commentateurs politiques s’échinent à trouver le terme adéquat pour qualifier l’idéologie de la probable future présidente du conseil (le terme ambigu de « postfasciste » ayant la faveur des éditorialistes), il semble indéniable que Giorgia Meloni est résolument conservatrice, voire même réactionnaire.

La leader d’extrême-droite n’a ainsi jamais caché sa détestation de l’avortement, qu’elle qualifie de « défaite ». Invité à un meeting du parti espagnol d’extrême-droite Vox, son discours ne laissait pas trop planer le doute : « oui à la culture de la vie, non à celle de la mort » avait-elle déclaré devant une foule chauffée à blanc. En tant que conseillère municipale de Rome, elle avait également proposé la création d’un cimetière pour les fœtus avortés.

Jusqu’à 80 % d’objecteurs de conscience dans certaines régions italiennes

Durant la campagne électorale, la leader d’extrême-droite a cependant tenu à rassurer les féministes : « je ne veux pas changer la loi sur l’avortement, je veux y ajouter des droits » a-t-elle déclaré. Elle souhaite ainsi lancer un programme de « prévention » de l’IVG, pour dissuader les femmes d’y avoir recours et souhaite créer un fonds pour attribuer une aide financière aux femmes pauvres pour ne pas qu’elles avortent.

Les régions des Abruzzes et des Marches, dirigées par le parti Fratelli d’Italia depuis respectivement 2019 et 2020, donnent une idée de ce qui attend peut-être les femmes italiennes. Dans ces régions, l’accès à l’avortement médicamenteux est limité à sept semaines (contre neuf semaines dans le reste du pays) et plus de 80 % des gynécologues y sont enregistrés comme « objecteurs de conscience » refusant de pratiquer des IVG. Se faire avorter relève ainsi du parcours du combattant.

Plus au nord, au Piémont, le parti Fratelli d’Italia a obtenu qu’une allocation de 4 000 euros soit accordée à chaque femme renonçant à se faire avorter.

Une politique « nataliste » inspirée de la France

Le droit à l’avortement est garanti en Italie depuis 1978 jusqu’à 90 jours de grossesse mais ce genre d’initiatives ainsi que le nombre important de gynécologues refusant de pratiquer l’IVG (67 % selon le dernier recensement du ministère de la Santé en 2019) ont conduit à une division par trois du nombre annuel d’avortements depuis le début des années 1980. L’Italie a ainsi été rappelée à l’ordre à deux reprises par le Conseil de l’Europe pour les trop nombreux obstacles à l’IVG qui existent dans le pays.

Ce rejet de l’avortement s’inscrit dans le cadre plus général d’une politique résolument nataliste prônée par la future chef du gouvernement. Avec un taux de natalité de seulement 1,24 enfants par femme et la deuxième population la plus âgée du monde (derrière le Japon), l’Italie s’enfonce dans une crise démographique. Création d’un quotient familial, augmentation des allocations familiales, ouverture de nouvelles places de crèches et allongement du congé parental : la politique de Giorgia Meloni en la matière semble très inspirée du modèle français.

Depuis la victoire de la coalition de droite ce dimanche, les positions très conservatrices de Giorgia Meloni suscitent l’inquiétude d’une partie de l’Europe. Interrogée ce lundi sur la situation en Italie, la Première Ministre Elisabeth Borne a assuré qu’elle serait « attentive au respect du droit à l’avortement ». Mais que les féministes se rassurent : Giorgia Meloni sera loin d’avoir les mains libres en Italie et devra notamment se concilier avec ses alliés de droite et du centre-droit.

Rappelons tout de même que la durée de vie moyenne d’un gouvernement en Italie n’est que de 18 mois.

Par Nicolas Barbet

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