Ils ont arrêté médecine : Maxime, 22 ans, burn-outé en 4e année

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Sortis du cursus après avoir réussi leur Paces, ils seraient entre 5 et 10% à avoir abandonné leurs études de médecine. Une décision très difficile à prendre mais parfois salvatrice, comme nous le raconte Maxime.

Ils ont arrêté médecine : Maxime, 22 ans, burn-outé en 4e année

Disparus. Evaporés. Il y aurait entre 5 et 10% d’étudiants en médecine qui sortent des radars entre leur admission en 2e année et leur thèse, selon les estimations de la commission « Jeunes Médecins » du conseil de l’Ordre. « C’est sans doute un peu plus élevé en médecine que dans d’autres cursus d’études supérieures, où les « perdus de vue » représentent 4 à 6% des étudiants. Mais c’est moins que ce que nous redoutions avant de mener une enquête auprès de quatre facultés de médecine (Créteil, Nancy, Paris 6 et Tours) », indique le Dr Bruno Boyer, qui présidait cette commission il y a encore quelques mois. Une enquête qui est restée dans les tiroirs, faute de généralisation.
Entre un étudiant sur 10 et un sur 20 concernés… Un phénomène loin d’être insignifiant. Et même d’une « certaine gravité », estime le Dr Boyer. « Certains ont fait le choix délibéré de changer de voie pour devenir journaliste, start-upper, industriel, etc… Mais pour d’autres, il s’agit d’un pétage de plombs. Des étudiants qui sont tombés malades indépendamment de leur cursus ou du fait même de leur cursus », commente le Dr Boyer. 
 

Première garde aux urgences : « qu’est-ce que je fous là ? »

Maxime, 22 ans, a arrêté médecine en 4ème année, en janvier 2019. Impossible à imaginer quand il nous raconte le début de ses études.  « J’ai eu un Bac S avec mention très bien. Je voulais faire médecine depuis le collège, par goût pour le scientifique mais aussi par attirance pour le niveau de vie des médecins. J’ai eu ma PACES du premier coup et suis allé directement en médecine. Mes 2ème et 3ème années se sont très bien passées, j’avais 16 de moyenne. J’étais tellement passionné par la dissection que j’ai passé le concours pour devenir moniteur auprès des 2ème et 3ème année. Lors du stage d’été de 4ème année, j’ai commencé à avoir un peu d’appréhension. Je pensais déjà aux ECN, parce que je voulais radiologie ou ophtalmologie. Je me suis sans doute mis la pression plus tôt que les autres… Puis, j’ai découvert le milieu de l’hôpital. J’ai trouvé ça très anxiogène. Les malades, l’urgence, l’ambiance en général. Je pensais que j’allais réussir à me créer une carapace et à ne pas faire de transfert sur ma famille, mes amis, mais non. Quand j’ai fait mes premières gardes aux urgences, je me suis dit : qu’est ce que je fous là ? Puis j’ai fait un stage en dermato. Il y avait une patiente de 38 ans avec un mélanome métastasé. Ses enfants de 7 et 10 ans et sa maman étaient venus la voir et le lendemain, elle est décédée. C’est un cas qui m’a beaucoup marqué. Mais à ce moment-là, je ne me posais pas du tout la question d’arrêter la médecine."
 

« Je ne pouvais plus aller à l’hôpital »

Une semaine plus tard : crises d’angoisse, crises de larmes, tremblements… Maxime commence à vivre un enfer à chaque fois qu’il doit reprendre le train pour retourner en stage. « Je ne me sentais plus à ma place, je n’étais plus à l’aise avec les patients. Les semaines passaient et c’était de pire en pire ». À Noël, une semaine de vacances hors des murs (in)-hospitaliers : il se sent très en forme. « Le dimanche avant de repartir, je n’ai pas pu reprendre le train. Ma mère a proposé de m’emmener mais j’ai quitté le stage à midi, en larmes, ce qui ne me ressemble pas du tout. » Le médecin traitant pose le diagnostic de burn-out et lui prescrit des anxiolytiques. Maxime prend le temps de « se poser ». Il met longtemps à accepter l’idée d’arrêter médecine alors qu’il a de très bons résultats. Ses amis en médecine ne comprennent pas tout, mais ses parents le soutiennent. « J’ai fait une séance d’acupuncture et le soir même, je me suis dit : « ce qui ne va pas, c’est la médecine, il faut que j’arrête ». À partir de là, Maxime commence à remonter la pente et les crises d’angoisse s’estompent. Accompagné par une psychologue du travail, il avance très vite vers un nouveau projet professionnel. « Cette année, je fais un BTS d’optique en alternance et je voudrais compléter par un Master. Cette formation allie très bien le scientifique et le commerce. J’ai démarré en juin dernier chez mon patron actuel. Il veut agrandir son entreprise et me faire progresser, on a les mêmes objectifs. Je n’ai plus du tout d’angoisse quand je vais travailler. Aujourd’hui, je suis installé à Paris avec ma copine et j’adore ma vie. Médecine, ça me paraît très loin. »

 

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