COUP DE BLUES
HER DE SPIKE JONZE (2014)
DIAGNOSTIC - L’addiction au Net
SYMPTÔMES - Écrivain rêveur en pleine phase dépressive, Théodore tombe sous le charme de Samantha, uniquement au son de sa voix. On tombe amoureux pour moins que ça de nos jours, comme en témoignent les nombreuses relations ne dépassant pas le stade du tchat. Sauf que Samantha est condamnée à ne rester qu’une voix pour Théodore, puisqu’elle est un OS, programme informatique capable de s’adapter de façon intuitive à son propriétaire. Spike Jonze réussit le pari fou de nous faire croire à cette histoire et explore jusqu’à l’infini les implications que ce nouveau type de relation pourrait entraîner. Avec un regard désabusé mais toujours empathique porté sur notre société avide d’une perfection relationnelle basée sur la symbiose et l’annulation des différences.
TRAITEMENT - Le piratage du programme informatique s’impose, ce que Samantha, objet transitionnel surdoué, réussira à faire elle-même !
COUP DE MOU
NYMPHOMANIAC VOL. 1 & 2 DE LARS VON TRIER (2014)
DIAGNOSTIC - La nymphomanie
SYMPTÔMES - Depuis Antichrist, Lars Von Trier se fait le spécialiste du cas clinique démonstratif et empesé de la féminité en tant que pathologie psychiatrique. Cette fable sordide, d’une longueur injustifiée confinant à la torture, n’échappe pas à la règle. On y voit une jeune femme passer par tous les stades de l’addiction sexuelle : simple « nymphomane », elle expérimentera son besoin de nouveauté et de sensations par un masochisme insoutenable, puis se muera ellemême en vengeresse sadique de la cause féminine. Bien que débordant de métaphores jusqu’à la nausée, le film n’explique rien mais confirme que son réalisateur ne va pas mieux.
TRAITEMENT - Si vous avez le courage de résister aux 4 heures que dure le film (dans sa version courte !), il vous sera révélé lors de la dernière minute. Par gentillesse, on ne dévoilera rien.
COUP DE FOUDRE
LA VIE D’ADÈLE CHAPITRES 1 & 2 DE ABDELLATIF KECHICHE (2013)
DIAGNOSTIC - La perversion narcissique
SYMPTÔMES - Si ce film sublimement mis en scène et fort justement auréolé d’une Palme d’Or revêt l’apparence d’une énième bluette, il cache en réalité la description clinique d’une relation d’emprise disséquée jusqu’au malaise, passant par les différentes étapes que fait vivre le pervers à sa victime : évidence du coup de foudre, sentiment de complétude puis d’appartenance, remises en cause subtiles, isolement progressif, culpabilisation projective et enfin abandon brutal au moment où, vidé, l’autre est devenu inutile… Thème d’autant plus troublant qu’il a en quelque sorte vampirisé le film, Kechiche ayant été décrit par ses actrices et son équipe technique en des termes qui font écho à cette pathologie redoutable.
TRAITEMENT - La rupture, évidemment ! Totale, inévitable. Ce que parviendra à réaliser Adèle Exarchopoulos, dont la lente et fragile renaissance nous est pudiquement montrée et magnifiquement décrite.
COUP DE CŒUR
LES BIEN-AIMÉS DE CHRISTOPHE HONORÉ (2011)
DIAGNOSTIC - L’hystérie transgénérationnelle
SYMPTÔMES - Fresque intimiste rythmée par les événements marquants des 40 dernières années, ce film-somme montre de façon subtile, au travers de deux beaux portraits de femmes, comment l’Histoire a façonné l’évolution de nos rapports amoureux. Ou comment une génération soixante-huitarde inconséquente et éprise de liberté a légué à la suivante le besoin de stabilité et la peur de la maladie. Avec pour point commun ce symptôme central propre à l’hystérie : le manque du manque. Et un attrait prononcé pour les situations impossibles, théâtrales… voire dramatiques.
TRAITEMENT - Aucun bien sûr, car, dans cette ode magnifique à la vie, ces témoins du temps qui passe acceptent leurs contradictions et le poids de leur passé, quelle qu’en soit l’issue. Libérateur !
COUP DE REIN
SHAME DE STEVE MCQUEEN (2011)
DIAGNOSTIC - L’addiction sexuelle
SYMPTÔMES - Description épurée et sans affect d’une addiction sexuelle aux multiples visages (donjuanisme, masturbation compulsive, addiction à la pornographie…), ce film abstrait offre en contrechamp, de façon extrêmement allusive, une hypothèse à la souffrance de son héros, le magnétique Michael Fassbender, en la personne de sa sœur, borderline paumée autant que lui est froid et obsessionnel. Ou comment son addiction est vue comme une tentative de nier l’attachement pour échapper au traumatisme. Un grand film à voir, et à revoir. Rarement la souffrance de l’addict a été aussi bien filmée.
TRAITEMENT - La fin, ouverte, suggère que surmonter le traumatisme et développer son empathie sont la seule issue.