
Dr Damien Barraud.
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« J’en ai marre. J’en suis à ma quatrième procédure ordinale. C’est beaucoup de stress, d’énervement et de perte de temps. » La chambre disciplinaire de première instance Grand Est l’a sanctionné en juin d’une interdiction d’exercer pendant trois mois, dont un mois ferme à compter du 1er septembre, à la suite d’une plainte émise par un membre fondateur de l’association BonSens, connue pour ses positions complotistes et antivax. En cause : des messages « injurieux et diffamatoires » postés sur X (à l’époque Twitter).
« On me reproche de ne pas avoir respecté le code de déontologie. En clair, on peut m’insulter et me menacer sur les réseaux sociaux, mais je n’ai pas le droit de répliquer », déplore le médecin dans Libération. Il ne renie rien sur le fond : « Je suis droit dans mes bottes. Je regrette la forme de certains tweets, mais quand vous êtes harcelé nuit et jour, vous pouvez déraper. Sur le fond, je sais que j’ai raison à 100 %. »
L’indignation face à l’attitude de l’Ordre
Ce que ne digère pas Damien Barraud, c’est l’attitude du conseil départemental de l’Ordre des médecins de Moselle (CDOM 57), qui s’est associé à la plainte, au lieu de se limiter à son rôle de transmission : « Que le CDOM 57 joigne sa voix à des harceleurs complotistes d’extrême droite, cela déshonore bien plus l’Ordre que ce que j’ai pu faire. »
Un sentiment largement partagé dans la communauté médicale. Une tribune dans Le Point signée par une centaine de soignants, dont Agnès Buzyn, dénonce une procédure « fondée non sur le droit, mais sur la pression politique d’un groupuscule », et s’inquiète : « Si l’on peut abattre un réanimateur pour avoir défendu la science, alors plus aucun d’entre nous n’est à l’abri. »
Le CNOM tente de reprendre la main
Face à la polémique, le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) tente d’éteindre l’incendie. « On ne peut pas laisser dire qu’on est du côté des complotistes antivax. Non ! », proteste le vice-président Jean-Marcel Mourgues. Il appelle les médecins à faire preuve de modération, mais reconnaît aussi une forme de laxisme passé : « Dorénavant, l’Ordre sera intransigeant envers toute organisation ou individu menant des campagnes de harcèlement contre des médecins. »
Dans un communiqué, le CNOM a d’ailleurs pris acte du malaise suscité dans la profession. Il affirme désormais vouloir se montrer « intransigeant envers toute organisation ou individu menant des campagnes de harcèlement contre des médecins », qu’elles soient « disciplinaires, juridiques ou via les réseaux sociaux ». Ces pratiques, ajoute-t-il, feront désormais l’objet de « poursuites judiciaires systématiques ».
Fatigué, l’anesthésiste a décidé de quitter Twitter, où il ne publie plus rien depuis des mois, après des années de harcèlement quotidien. « Même sans rien faire, j’ai toujours 50 messages d’insultes dans ma boîte chaque matin. » Il a ouvert un compte sur BlueSky : « Il est temps de refaire de la médecine et d’arrêter de jouer avec le ventilo à merde du cloaque nommé Twitter. »
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