Contention préventive et administration abusive de neuroleptiques : deux pays condamnés pour leurs conditions « dégradantes » d'hospitalisation forcée

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La Cour européenne des droits de l'Homme a annoncé hier les condamnations de l'Italie et de l'Ukraine dans deux affaires d'hospitalisation sous contrainte dans des services psychiatriques, analysées comme des traitements inhumains ou dégradants.

Contention préventive et administration abusive de neuroleptiques : deux pays condamnés pour leurs conditions « dégradantes » d'hospitalisation forcée

© Midjourney x What's up Doc

Dans l'affaire italienne, le plaignant avait été attaché à son lit par des lanières aux poignets et aux chevilles pendant près de huit jours, indique dans un communiqué la Cour, qui siège à Strasbourg.

Si les magistrats européens estiment que la décision initiale d'attacher le patient était « nécessaire » pour l'empêcher de « nuire à lui-même ou à autrui », ils rappellent aussi que « toute mesure de contention appliquée pour une période plus longue que quelques heures doit faire l'objet d'un réexamen par un médecin à intervalles réguliers ».

Or, selon le dossier médical du patient, « des périodes d'une durée significative se sont écoulées sans aucun contrôle ».

Le plaignant estime que le fait de l'attacher à son lit était une mesure « de précaution » plutôt qu'une mesure « de dernier recours », ce qui n'a pas été contredit, et des médecins ont reconnu à posteriori que cette mesure était « problématique en ce qui concernait sa mise en œuvre et contestable sur le plan éthique ».

« Il n'a pas été démontré que l'application de la mesure de contention pendant si longtemps était strictement nécessaire », concluent les juges, qui condamnent l'Italie pour violation de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, interdisant les « traitements inhumains ou dégradants ».

Rome devra verser 41 600 euros au plaignant, une somme importante au regard de la jurisprudence de la CEDH.

« Limiter sa liberté de circulation »

Dans une seconde affaire, une patiente ukrainienne se plaignait d'avoir été internée pendant 13 jours dans un hôpital psychiatrique, de s'être vue administrer des médicaments neuroleptiques et d'avoir été attachée à son lit à chaque fois qu'elle tentait de partir.

La jeune femme, qui souffrait d'anxiété, n'avait cependant fait l'objet « ni d'une expertise réalisée par un collège de psychiatres, ni d'une décision de justice autorisant son internement », souligne la CEDH.

La Cour estime en outre qu'il « n'était pas prouvé qu'il fût nécessaire d'administrer des neuroleptiques à la requérante ou de l'attacher ». « Les mesures de contention lui ont été appliquées à la seule fin de limiter sa liberté de circulation », souligne-t-elle.

Elle a ainsi condamné l'Ukraine pour violation du droit à la liberté (article 5 de la Convention), et violation de l'interdiction des traitement inhumains ou dégradants.

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/psychiatrie-les-droits-fondamentaux-des-personnes-privees-de-liberte-toujours-bafoues

Kiev devra verser 16 000 euros à la jeune femme pour « dommage moral ».

Avec AFP

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