Il faut engager "la reprise sans délai de la discussion sur le projet de loi fin de vie", a déclaré samedi, juste après la nomination d'un nouveau gouvernement, l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD).
Le ton employé par cette association, fer de lance de la légalisation du suicide assisté et de l'euthanasie, traduit la frustration des partisans de ce projet de loi, dont l'examen a été brusquement interrompu en juin par la dissolution inattendue de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron.
Ce texte venait d'entamer son examen par les députés après près d'un an de tergiversations du gouvernement sur ce sujet particulièrement délicat au vu des enjeux éthiques et intimes qu'il reflète.
Il devait légaliser une forme de suicide assisté et, dans certains cas précis, d'euthanasie, en y apportant d'importantes conditions, tout en se refusant à employer ces termes, préférant plutôt parler d'"aide active à mourir".
L’examen de la loi sur la fin de vie doit reprendre de zéro
Avec l'élection début juillet d'une nouvelle Assemblée, encore plus éclatée politiquement que la précédente, la question de l'avenir de ce projet s'est posée. L'examen devrait de toute façon reprendre de zéro.
Défenseur de longue date de la légalisation du suicide assisté, le député Olivier Falorni (apparenté Modem), qui présidait les débats parlementaires sur le projet de loi, tente de relancer la machine. Il vient de déposer une proposition qui reprend très largement le contenu du projet interrompu.
Mais, même si les parlementaires peuvent théoriquement adopter une loi indépendamment de l'exécutif, celui-ci garde largement la main sur l'agenda législatif. Or, la tâche semble franchement se compliquer pour les partisans de ce texte, avec l'annonce vendredi d'un gouvernement nettement marqué à droite.
Né d'une alliance entre, au centre, le camp macroniste et, à droite, les Républicains (LR) dont est issu le Premier ministre Michel Barnier, ce gouvernement compte nombre d'opposants déclarés à ce projet de loi et, plus largement, à l'euthanasie et au suicide assisté.
Au premier rang, on peut notamment compter le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, issu des rangs de la droite conservatrice.
Michel Barnier n’a pas vraiment donné son avis sur l’aide active à mourir
D’autres ministres, même macronistes comme Astrid Panosyan-Bouvet (Travail) ont aussi exprimé leur opposition, bien que l'évolution de la loi sur le sujet ait longtemps été une promesse d'Emmanuel Macron.
Toutefois, ces personnalités n'ont pas à aborder directement la fin de vie dans leurs attributions. Contrairement à la nouvelle ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, qui a beaucoup participé comme députée aux débats sur le projet de loi, mais n'en apparaît pas comme une défenseure inconditionnelle.
Elle avait notamment plaidé pour ne pas considérer l'aide à mourir comme un soin, une revendication de certains soignants, mais un choix qui amoindrirait la portée de la loi, selon les partisans du suicide assisté.
Sa nomination "ne porte aucun espoir nouveau", pour l'ADMD qui lui reconnaît toutefois "un certain intérêt pour le sujet".
La ministre serait-elle, de toute façon, en mesure de relancer le sujet, au vu des équilibres gouvernementaux ? Sollicitée lundi par l'AFP, Geneviève Darrieussecq a dit soutenir l'idée que les parlementaires "doivent terminer le travail".
Reste qu'elle a ajouté devoir "en parler avec le Premier ministre" dont elle n'a "pas la position".
Et Michel Barnier n'a pour l'heure guère donné de signal en la matière. Interrogé dimanche sur les inquiétudes quant à la place de la droite conservatrice dans son gouvernement, le Premier ministre a promis de préserver les "droits acquis", tel le mariage homosexuel, mais n'a pas évoqué la fin de vie.
Avec AFP