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Une affaire ancienne… mais un jugement cinglant
« On achète les médecins ! » : ce propos, capté lors d’écoutes policières en 2010, aura été l’un des déclencheurs d’une enquête longue et tentaculaire. À l’origine : AMS, une entreprise du Val-de-Marne spécialisée dans le matériel respiratoire. Entre 2010 et 2014, ses dirigeants ont mis en place un système organisé de corruption de pneumologues, en leur versant des avantages matériels ou financiers – voyages à l’étranger, cash, matériel informatique, installation de cabinets – en échange de prescriptions favorisant leurs produits, pris en charge par l’Assurance maladie.
Le jugement, rendu ce lundi, par la 31e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris est sans équivoque : jusqu’à 300 000 euros d’amende pour les dirigeants, des interdictions professionnelles, et la reconnaissance de la faute morale de praticiens prescripteurs.
- 300 000 € d’amende pour le fondateur d’AMS, Yannick M., à qui le tribunal attribue un « discours opportuniste ».
- 150 000 € d’amende, dont 50 000 € avec sursis, pour l’ancien directeur des affaires financières, Guillaume Q., avec interdiction d’exercer une fonction financière pendant 5 ans (avec sursis).
- 15 000 € d’amende pour une pneumologue, le Dr L., reconnue coupable malgré ses dénégations. Elle était soupçonnée d’avoir bénéficié d’un ordinateur et d’un voyage.
Tous trois devront verser 12 000 € au Conseil national de l’Ordre des Médecins au titre du préjudice moral.
Un système structuré autour de la prescription
Selon les pièces versées au dossier, AMS aurait débloqué un budget marketing de plus d’un million d’euros pour arroser ses partenaires médicaux. Un commercial expliquait : « Un bon médecin a 7 ou 8 patients par mois et rapporte 70 000 euros par an ». La logique de retour sur investissement était assumée, et les pratiques contournant la loi anti-cadeaux se faisaient dans une atmosphère d’omerta.
Certains médecins ont été jugés séparément, en CRPC (Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité) à l'été 2024, et condamnés à des amendes allant jusqu’à 200 000 euros, avec interdiction d’exercice commercial ou médical pendant trois ans (avec sursis).
Ce dossier a mis plus de dix ans à aboutir, en partie ralenti par l’engorgement des cabinets d’instruction et l’effet du Covid sur le pôle santé publique. Il aura au final débouché sur une condamnation ferme de pratiques contraires à la déontologie et un rappel de l’interdiction d’octroi d’avantages aux médecins.
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