Quand les médecins homos décrivent l’attitude de leurs confrères et des équipes soignantes…*

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« Bravo, beau boulot, pas un travail de tafiole ! » Voici le genre de commentaires le plus cité parmi les réponses concernant les remarques et railleries dont certains ont pu être la cible À l’hosto. La majorité des interviews fait état d’habitudes de langage maladroites, finalement très communes.

Quand les médecins homos décrivent l’attitude de leurs confrères et des équipes soignantes…*

Mais, à bien écouter, pas seulement… Si une minorité précise avoir pâti de remarques personnelles directes sur sa sexualité, la majorité rapporte surtout des discours blessants, empreints de clichés le plus souvent désagréables sur les homos, voire carrément homophobes. « Il n’y a pas de méchanceté en soi mais beaucoup de remarques. » S., chir. Des propos tenus sur les patients, les confrères, à caractère général voire universel, même, pourrait-on dire. Souvent, ces discussions cessent d’elles-mêmes quand les interlocuteurs se rendent compte de la présence d’un homo dans la conversation, mais cela témoigne bien d’un naturel évident.

Pour autant, personne ne rapporte de réactions ouvertement négatives de confrères ayant appris ou découvert leur homosexualité (cf. article « Le Coming-Out professionnel est-il de rigueur aujourd’hui ? »). Certains restent simplement distants « Les gens à qui cela pose un problème […] ne posent pas de question perso. » D., gynéco obs. De fait, cette attitude conditionne les liens et les rapports entre praticiens, allant du choix des amis et collègues pour certains à l’évitement total de ce sujet pour d’autres.

Quant à souffrir de cette ambiance professionnelle, la majorité des témoignages s’accordent à dire que « non », il n’y a pas globalement de réelle souffrance, certains évoqueraient même des bénéfices indirects (cf. article « Y a-t-il un Gay Power des médecins homos ? »). Une minorité cependant évoque une forme de blessure, parfois en lien direct avec des réflexions de terrain : « Je garde une cicatrice des propos homophobes aux urgences. » A., méd gé, ou, en réaction à des non-dits qui pèsent lourdement : « ne jamais le dire, voire mentir, est quelque chose de pesant » N., psy.
Beaucoup de témoignages reviennent sur les rapports avec les patients VIH. Il est souvent constaté et reproché le manque de tact dans les annonces diagnostics et les suivis. Globalement, tous restent choqués par l’assimilation : patient séropo = patient homo. Ce raccourci semble toujours bien ancré chez les médecins. « Si un patient a le VIH, c’est qu’il est homo ! Et ce ne sont pas les vieux qui disent ça, ce sont des jeunes de notre génération ! » S., chir. Bien sûr que l’homosexualité est un facteur de risque, mais de là à tenir des propos « de concierge » de cause à effet, sans distinction : on est très loin de l’Evidence-Based Medicine…

Face à cette situation, le rire est une arme que quelques-uns emploient.
« [Je suis] éventuellement [la cible] de blagues de mauvais goût, mais, provoquées par moi, donc non subies et appréciées avec humour. » T. spé med. Et parfois, ce sont mêmes des remarques qui font sourire car pour être marquées du sceau des représentations hétéros où l’homosexualité est une inconnue, elles n’en sont pas moins bienveillantes : « Lorsque j’ai amené ma fille, mon chef m’a dit très sincèrement qu’elle me ressemblait. Il savait que c’était ma compagne qui l’avait eue mais il n’avait pas réfléchi. C’était touchant ! Il me voyait comme mère de l’enfant. » S., chir.

Source:

*Interviews réalisées aupr`es de 11 jeunes médecins homos, dont 1 « non exclusif », de 26 À 39 ans, soit 9 hommes et 2 femmes, originaires de villes différentes, de promos d’internat de toute la France et exercant aujourd’hui des spé variées (méd G, psy, anesth, réa, gynéco-obs, spémed ou chir).

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