L'Université de médecine de Strasbourg fait la lumière sur son passé nazi

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L’Université de Strasbourg a rendu public un rapport de 500 pages qui passe au crible les liens entre sa faculté de médecine dans l'Alsace occupée par les nazis et les "crimes médicaux de guerre" qu'ils avaient commis.

L'Université de médecine de Strasbourg fait la lumière sur son passé nazi

Déclencheur de cette vaste enquête, conduite par une quinzaine de chercheurs : la découverte en 2015 dans les locaux de l'Institut de médecine légale de Strasbourg de restes d'une victime juive, assassinée en 1943 au camp de concentration du Struthof à Natzweiler (Bas-Rhin).

Conservés pour servir de preuves dans des procès de médecins nazis, ces restes étaient ensuite tombés dans l'oubli.

"Nous avons décidé de faire œuvre de vérité, tel un coup de projecteur sur le passé douloureux et sombre", souligne Michel Deneken, le président de l'université, en introduction du rapport.

"Cette lumière révèle ce qui 70 ans durant fut caché de la Reichsuniversität (Université du Reich, ndlr), mais elle relève d'un devoir moral", souligne-t-il.

Pendant cinq ans, les auteurs du rapport, médecins et historiens, ont plongé dans plus de 150.000 pages d'archives allemandes et françaises, mais aussi américaines, russes ou polonaises.

La Reichsuniversität avait pris le relais de l'Université de Strasbourg, évacuée vers Clermont-Ferrand dès 1939, avec, dans ses rangs des enseignants et des étudiants allemands mais aussi 96 médecins et 12% des étudiants en médecine originaires d'Alsace-Moselle.

Les camps de concentration en Alsace ont servi de "sources d'approvisionnement en êtres humains pour au moins trois professeurs"

Le camp de travail de Vorbruck-Schirmeck et le camp de concentration du Struthof, situés en Alsace, ont servi de "sources d'approvisionnement en êtres humains pour au moins trois professeurs" allemands de médecine, "dans le cadre d'expérimentation humaines", selon les chercheurs.

Des expériences ont été conduites avec du gaz moutarde ou du phosgène, un gaz de combat, et sur des tests de vaccins contre le typhus, faisant plusieurs morts dont certains identifiés pour la première fois par le rapport.

Les chercheurs ont également découvert dans les archives de l'université, des collections de lames histologiques, destinées à être observées au microscope, et des organes humains conservés, datant des années 1941-1944. Mais "aucun lien" entre ces collections et "des expérimentations criminelles n'a pu être établi", précisent-ils.

Au terme de ses travaux consultables sur la base de données de l’univeristé, la commission émet plusieurs recommandations pour entretenir la mémoire de ces événements, notamment la création de lieux de commémoration au sein même de la faculté de médecine.

"Nous nous sentons fortement engagé dans la suite de ce travail", a déclaré Michel Deneken, qui envisage un futur "Centre d'information et de recherche".

Avec AFP

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