Certificats médicaux : les MG tapent du poing

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Nouvelles règles pour les sportifs de l'extrême

Certificats médicaux : les MG tapent du poing

À quinze jours de la rentrée sportive, les ministères de la Santé et des Sports ont arrêté les modifications de délivrance des certificats médicaux quant à la pratique des sports dits « à contraintes particulières. » Les syndicats de MG s'inquiètent, WUD fait le point.

La loi du 26 janvier 2016 sur la modernisation du système de santé portée par Marisol Touraine a apporté des simplifications quant à la délivrance des certificats de non-contre-indication à la pratique du sport. Depuis le 1er juillet dernier, la mise en place d’un questionnaire de santé permet au membre d’un club sportif de savoir s’il est utile de consulter un médecin pour le renouvellement de sa licence. Sinon, le certificat est désormais exigé non-plus chaque année, mais tous les trois ans.

Évidemment, cela concerne la plupart des sport sauf ceux « des disciplines sportives à contraintes particulières », explique l’arrêté du 24 juillet 2017, fixant les caractéristiques de l’examen médical spécifique à la délivrance d’un certificat pour leur pratique. Alpinisme au-dessus de 2 500 mètres d’altitude, plongée subaquatique, spéléologie, disciplines comportant l’utilisation d’armes à feu, de « véhicules terrestres à moteur » ou d’un aéronef : jusque-là, un examen médical pour la délivrance d’un certificat de non-contre-indication semble logique.

La boxe et le rugby : près de 330 000 sportifs concernés

Mais ce sont deux sports très populaires en France qui vont voir leurs modalités d’accès renforcées. Les 272 800 licenciés de rugby et les 55 409 licenciés de boxe en France doivent désormais passer un examen médical plus approfondi. Sans compter les autres sports de combat « pour lesquels le combat peut prendre fin (…) lorsqu’à la suite d’un coup porté, l’un des adversaires se trouve dans un état le rendant incapable de se défendre », comme la boxe anglaise.

Pour ces sports, il faudra, pour renouveler sa licence, effectuer un examen ophtalmologique mesurant acuité visuelle, champ visuel, tonus oculaire et fond d’oeil. Pour la boxe anglaise est désormais requis une remnographie (IRM) des artères cervico-céphaliques et « une épreuve d’effort sans mesure des échanges gazeux » tous les trois ans, pour les plus de 40 ans. Cela concerne les professionnels, comme les amateurs !

ECG ou IRM : tournée générale

Pour la pratique du rugby à XV et à VII, en compétition ou non, le licencié devra dès l’âge de 12 ans, puis tous les trois ans jusqu’à 20 ans, et tous les cinq ans jusqu’à 35 ans, réaliser un électrocardiogramme (ECG). Si le sportif a plus de 40 ans et qu’il joue en première ligne, le médecin devra, avant délivrance du certificat, réaliser en plus un IRM cervical ou lombaire tous les ans, pour une pratique loisir. Pour la compétition, rajoutez-y une écho-cardiographie et un bilan glucide-lipidique. Et que ça saute !

Les syndicats de MG, spécialité en première ligne dans la délivrance des certificats de non-contre-indication à la pratique sportive, s’insurgent. Avec plus de 330 000 sportifs concernés par ces nouvelles règles, les médecins généralistes vont devoir lire cet arrêté avec la plus grande attention. MG France se demande qui va payer. Le coût des examens désormais exigés n’est pas négligeable pour un sportif : 69€ l’angio-IRM ou 96€ l’écho-cardiographie, note le syndicat, qui demande au ministère « si ces dépenses seront prises en charges par les régimes complémentaires, obligatoires ou par les assurances des fédérations. » Vaste question.

« La SFMES est-elle une société savante reconnue par tous ? »

Le Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG) s’élève par communiqué contre ces mesures qui vont « sérieusement entraver l’accès des français, notamment des plus démunis, à ces disciplines ». Rappelons que les consultations pour des formalités administratives, telles que le renouvellement d’un certificat de non-contre-indication à la pratique sportive, ne sont pas remboursées par la Sécurité sociale.

La Société Française de Médecine de l’Exercice et du Sport (SFMES), dont l’arrêté suit les recommandations, « est-elle une société savante reconnue par tous ? », s’interroge de son côté la Fédération des médecins de France (FMF).  Le syndicat dénonce un arrêté qui « ne précise absolument pas à partir de quel degré d’anomalie sur ces examens le sport devient contre indiqué (…) Une hypercholestérolémie à 2,50 g est un résultat anomal. Est-ce une contre-indication à être rugbyman après 40 ans ? » ajoute-t-il pour enfoncer le clou.

Avez-vous le matériel nécessaire dans vos cabinets ?

Pour les représentants des MG, « dans les terres de rugby (…) ça va forcément bouchonner dans les cabinets équipés ». Car se pose évidement la question de l’équipement et des compétences. Avez-vous le matériel nécessaire à un ECG ou à un examen ophtalmologique ? Là où auparavant le MG était le médecin vers lequel on se tournait pour ce genre de certificat, les licenciés de sports extrêmes et de combat ou les rugbymans devront peut-être se rendre dans un service de médecine du sport « qui sera (peut-être) équipé de toute l’infrastructure nécessaire et des gens compétents pour l’utiliser », souligne la FMF.

Le SNJMG demande lui aux ministères de revoir leur copie, « au besoin en recourant à une discussion avec les fédérations sportives et les spécialités médicales concernées (à commencer par les MG) ». Ce serait, après le tollé provoqué par l’arrêté, la moindre des choses.

Source:

Thomas Moysan

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