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Frédéric Péchier, 53 ans, comparaît depuis début septembre pour 30 empoisonnements de patients âgés de 4 à 89 ans, dont 12 sont morts, commis entre 2008 et 2017 dans deux cliniques de Besançon, dans le but de nuire aux confrères et consœurs avec lesquels il travaillait.
Dans cette dernière ligne droite du procès ouvert le 8 septembre, cette séquence consacrée aux parties civiles doit durer jusqu’à aujourd’hui.
Réquisitions et plaidoirie attendues
Le ministère public prendra ensuite la parole pour ses réquisitions jeudi et vendredi, avant la plaidoirie de l’avocat de la défense, Randall Schwerdorffer, prévue lundi 15 décembre.
« La chose la plus précieuse pour un médecin, c’est son patient. Si on s’en prend au patient, on s’en prend au médecin. Le patient est blessé dans sa chair, le médecin dans son âme », a plaidé Me Ariel Lorach devant la cour d’assises.
Son client, le docteur Sylvain Serri, et sa compagne Catherine Nambot, tous deux médecins anesthésistes, ont vécu « un cauchemar ». Sept de leurs patients ont été victimes d’un arrêt cardiaque suspect, dont six pour le seul Sylvain Serri, l’un des praticiens les plus touchés par les empoisonnements imputés à Frédéric Péchier.
Des collègues ciblés
Ancien ami de l’accusé, il s’est attiré ses foudres après un repas qui a tourné au vinaigre. Frédéric Péchier l’a même désigné comme possible empoisonneur, avant de se « rétracter à la barre », a noté Ariel Lorach.
« Les médecins, eux, ont prêté le serment d’Hippocrate, l’accusé le serment d’hypocrite », a tancé l’avocat, et « il s’est arrogé le droit suprême de vie et de mort ».
L’accusation lui reproche d’avoir pollué des poches de perfusion pour provoquer l’arrêt cardiaque de patients pris en charge par d’autres médecins, et ainsi nuire à des collègues.
Le poison comme outil de sabotage
Frédéric Péchier a ainsi, selon Kevin Louvet, empoisonné quatre patients des docteurs Martial Jeangirard et Loubna Assila pour les « discréditer » et les « faire plier ».
Martial Jeangirard s’était opposé au retour du praticien à la clinique Saint-Vincent, après son passage à la Polyclinique de Franche-Comté, et Loubna Assila était « devenue une menace » pour lui, « par sa compétence qu’il ne peut accepter, par ses suspicions quand elle perçoit quelque chose de pas net dans cette clinique et par sa fougue de jeune anesthésiste talentueuse », a souligné leur conseil.
Des années de culpabilité
Ces praticiens ont été « rongés pendant des années par un sentiment de culpabilité et d’impuissance » face à la mort incompréhensible de leurs patients. « Ils n’y étaient pourtant pour rien » car « une seule personne est responsable de ces vies brisées, de ces vies arrachées, c’est Frédéric Péchier », a plaidé Kevin Louvet.
Les médecins anesthésistes, dont le contrat moral est de réveiller leurs patients, sont des « victimes indirectes » de cette affaire, a souligné lundi soir la bâtonnière Emmanuelle Huot, intervenant pour Jacques Pignard, anesthésiste de la Polyclinique.
« Ils ont tous à un moment donné au cours de leur audition soit pleuré, soit eu des trémolos dans la voix », a-t-elle dit.
Un accusé sans émotion
Ce n’est pas le cas de l’accusé, qui n’a pas montré de compassion envers les patients touchés. Or, pour Georges Lacoeuilhe, avocat d’Anne-Sophie Balon, l’anesthésiste qui a permis de révéler l’affaire, « l’indifférence » de Frédéric Péchier envers les victimes « est la marque de la culpabilité ».
L’accusé, qui comparaît libre, clame son innocence et encourt la réclusion à perpétuité. Le verdict est attendu d’ici au 19 décembre.