
Charlotte Le Bon et Damien Bonnard dans Niki.
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Céline Sallette raconte la trajectoire de cette artiste totalement autodidacte en se centrant sur ses balbutiements, ses tâtonnements, et nous rappelle que le processus de création est avant tout une tentative de résolution psychique. Charlotte le Bon, impliquée et éruptive, illumine ce film modeste et un peu trop sage.
En choisissant de rendre hors champ toute œuvre plastique et picturale dans son film qui ne parle que d’art, Céline Sallette a-t-elle cherché à se libérer du poids de l’image afin de mieux nous rapprocher de l’humanité des artistes, de leur regard, de leur chair ? Si l’œuvre d’art symbolise la rencontre entre deux psychés, celle qui la conçoit et celle qui la scrute, c’est ainsi à Niki, la femme, et à elle seule, que Céline Sallette souhaite que nous accédions. Un hommage qu’elle ne réussit jamais autant que lorsqu’elle se focalise exclusivement sur son combat intérieur, ses agirs impulsifs et ses excentricités. Elle a trouvé en Charlotte le Bon un miroir presque mediumnique de l’artiste, en tout cas particulièrement lisible. C’est, en l’occurence, la grande qualité du film.
« L’hommage apparaît un peu trop corsetant, d’autant qu’il s’appuie sur l’invisible frustrant, bien qu’intrigant, de l’œuvre »
La gestation et la naissance d’une œuvre sont de passionnants objets d’investigation. Le passé traumatique de Niki de Saint Phalle, qui a subi l’inceste paternel, s’y prête particulièrement, tant il est emblématique d’une souffrance cherchant constamment une issue. Peut-être est-ce parce que le processus qu’il cherche à capter est un modèle du genre que le film déçoit quelque peu. Didactique et illustratif, il se garde de se noyer en eaux trop profondes, privilégiant l’élégance modeste des reconstitutions, par ailleurs fort justes, à l’audace expérimentale. L’hommage apparaît un peu trop corsetant, d’autant qu’il s’appuie sur l’invisible frustrant, bien qu’intrigant, de l’œuvre.
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C’est ainsi que la puissance de nombreuses scènes, à l’image des confrontations de Niki avec un psychiatre ambivalent, a tendance à se diluer au milieu des descriptions bohème et anecdotiques d’un milieu artistique qui, parce qu’il n’a rien à nous montrer, finit par nous désintéresser.