Un médecin jugé pour des ordonnances de complaisance de psychotropes, prévus pour la revente

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Des psychotropes revendus sous le manteau à des toxicomanes et des personnes fragiles : des peines allant de deux à cinq ans de prison, dont un avec sursis, ont été requises mercredi 31 mai, à Bobigny à l'encontre de six personnes, dont un médecin, pour trafic de médicaments.

Un médecin jugé pour des ordonnances de complaisance de psychotropes, prévus pour la revente

© IStock

Mise en ligne initiale le 1er juin 2023

Lyrica, Rivotril, Subutex, Pregabaline... un couple sillonnait en voiture les rues de la Courneuve (Seine-Saint-Denis) et le nord de Paris pour proposer à la revente ces antiépileptiques et anti-dépresseurs, entre mars 2022 et avril 2023.

Les boîtes de médicaments étaient obtenues légalement en pharmacie grâce à des ordonnances de complaisance rédigées notamment par un médecin installé à Sevran.

"On est pauvres, on a fait ça pour payer l'hôtel", a justifié devant le tribunal correctionnel de Bobigny l'un des six prévenus, qui a reconnu l'ensemble des faits et son addiction à l'alcool et à la cocaïne.

Le ministère public a requis cinq de prison, dont un an avec sursis, à l'encontre de sa compagne et lui.

Le médecin s’est présenté libre au tribunal, il est poursuivi pour complicité

Quatre hommes et une femme comparaissaient détenus pour exercice illégal du métier de pharmacien tandis que le médecin, qui se présentait libre, était poursuivi pour complicité de ces infractions.

C'est à l'occasion d'achat de cigarettes à la Courneuve auprès de vendeurs à la sauvette que les apprentis pharmaciens pour la plupart toxicomanes entendent parler de la "combine" de revente de médicaments pour quelques centaines d'euros. Des noms de médecins peu regardants sur les prescriptions circulent dans le milieu.

Ce business pouvait "rapporter 300-400 euros tous les 3 jours", a expliqué une prévenue, elle-même en proie à des addictions lourdes.

Une plaquette de Subutex se revendait 10 euros, 50 pour le Lyrica et 5 euros pour un comprimé de Valium. Selon les enquêteurs, plus d'un millier de boites de médicaments ont été revendues pour un bénéfice estimé à 500 000 euros.

Le médecin a prescrit pendant près de trois ans plusieurs psychotropes au couple de vendeurs

Pour l'un des prévenus, surnommé le "magicien", tout a commencé dans la rue par la consommation de "drogue forte". Désirant arrêter, il se met à acheter du Subutex qu'il va finir par revendre pour "aider ses amis" à arrêter le crack.

Interdit d'exercer depuis cette affaire, le médecin assure avoir subi des "menaces" pendant les consultations du couple auquel il a prescrit pendant près de trois ans plusieurs psychotropes sans être leur médecin traitant. "Si j'avais su, j'aurais arrêté", a-t-il juré à la barre.

Le parquet a requis contre le médecin deux ans de prison et une interdiction d'exercer pendant trois ans.

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"Le trafic de médicaments est le lot quotidien du tribunal de Bobigny""les consommateurs sont aussi les revendeurs de rue", a déclaré la procureure en préambule de son réquisitoire. "La vente de médicaments prend le pas sur le trafic de stupéfiants", a alerté la magistrate.

Le jugement a été mis en délibéré au 13 juin.

Mise à jour du 13 juin 2023 :

L'homme a été condamné à quatre ans de prison ferme et un an de sursis probatoire en raison, selon la juge du tribunal correctionnel de Bobigny, de "l'extrême gravité des faits", de la durée pendant laquelle les délits ont été commis et également en raison de "la quantité de médicaments dont il était question".

Sa compagne, très émue à la lecture du délibéré, a elle été condamnée à deux ans de prison ferme et deux ans avec sursis probatoire. La moitié de la peine requise, ce qui "satisfait" son avocat, Me Nicolas Paganelli.

Comparaissant libre, le médecin qui a alimenté le réseau, en multipliant les ordonnances, a été reconnu complice des délits de trafic de médicaments et exercice illégal de la profession de pharmacien. Il a été condamné à deux ans de prison avec sursis et interdiction de toute activité médicale pendant trois ans, une décision conforme aux réquisitions. "On parle de produits d'une toxicité particulière," a souligné la juge mardi qui a rappelé le "contexte territorial complexe" dans lequel le réseau opérait.

Avec AFP

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