Santé connectée : il y a parfois loin de la coupe aux lèvres

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Quand la réalité de terrain s’invite à CHAM 2015

Santé connectée : il y a parfois loin de la coupe aux lèvres

A CHAM, il y a deux sortes d’invités. D’un côté, les stars. En 2015, celles-ci n’ont pas manqué : Luc Ferry, Claude Evin, Joël de Rosnay, Erik Orsenna, Emmanuel Macron, Laurent Alexandre… Et puis il y a tous les autres.

Dire que les participants au premier débat de la deuxième journée entraient plutôt dans la deuxième catégorie n’est pas leur faire injure. D’autant que leurs échanges autour de la santé connectée dans les territoires avaient le bon goût du vécu. Le moins que l’on puisse dire est que ce n’est pas toujours le cas des propos des invités les plus prestigieux.

C’est le Pr. Pierre Simon, président de la Société française de télémédecine, qui a déclenché les hostilités. Il l’a fait en douceur : « Il faut que le financement de la télémédecine soit plus clairement identifié », a-t-il suggéré. Traduction : c’est bien beau d’avoir des idées, encore faut-il pouvoir les financer.

Et Philippe Domy, futur ex-directeur du CHU de Montpellier, de renchérir, en prenant un peu moins de pincettes : « On vit dans le cloud, mais quand on a les mains dans le cambouis et les pieds dans la glaise, le décor est différent ». Même son de cloche du côté du Dr. Sébastien Robineaux, médecin généraliste et co-fondateur de la start-up « ipso santé » : « Il y a un gap entre le monde des bisounours et la réalité de terrain ».

Ces acteurs qui vivent au quotidien la santé connectée et ses insuffisances identifient plusieurs freins au développement de leurs projets : manque de financement bien sûr, mais aussi manque de volonté politique, infrastructures inadaptées, systèmes d’informations incompatibles, DMP introuvable…

Bien sûr, il serait exagéré de parler de fossé entre ces invités et les stars telles que Luc Ferry. Mais une petite mésaventure arrivée à ce dernier pourrait bien être le symptôme d’une faille qui est en train de se creuser. Au sortir des débats de CHAM, l’ancien ministre de l’Education avait en effet eu le malheur de se moquer sur Twitter des médecins qui ne savent pas ce que sont les NBIC (Nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives) :

"Un médecin se vante d'ignorer ce que signifient les "NBIC". Honnêtement, il ferait mieux de retourner à la fac ou de changer de métier..." — Luc Ferry (@FerryLuc) September 29, 2015

 

La réaction n’a pas tardé de la part du terrain : le philosophe a été inondé de tweets provenant de médecins connectés qui pointaient sa présumée déconnexion de leur réalité quotidienne.

Entre théoriciens et praticiens, deux camps semblent donc vouloir s’affronter. Chacun apporte sa pierre au débat, il n’y a pas lieu de les départager. Mais on peut interpréter ces remous comme un signe : quelque chose est en train de se passer dans le monde de la santé, et l’émergence d’une médecine à deux vitesses est un danger qu’il va falloir savoir écarter.

Source:

Adrien Renaud

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