Responsabilité : un médecin peut invoquer des recos ultérieures aux soins

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La Cour de cass' a cassé la CA de Bordeaux

Responsabilité : un médecin peut invoquer des recos ultérieures aux soins

La Cour de Cassation a cassé le 5 avril dernier une décision de la Cour d’appel de Bordeaux qui avait jugé un gynécologue-obstétricien libéral responsable des séquelles sur un nourrisson à l’issue d’un accouchement. La Cour d’appel avait rejeté des recommandations du CNGOF postérieures à l’acte médical, recommandations qui ont été acceptées en cassation.

Les faits remontent au 19 septembre 2007, dans la clinique Wallerstein d’Arès (Gironde). Une femme accouche dans la douleur : son enfant est en état de mort apparente et présente une agénésie des quatrième et cinquième doigts d’une main, ainsi qu’une microcéphalie. Transféré en urgence au CHU de Bordeaux, il conserve d’importantes séquelles neurologiques, relate l’arrêt de la Cour, repéré par l'APMnews.

L’offre de l’Oniam jugée insuffisante

La Commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI) d’Aquitaine, saisie par les parents du nourrisson, désigne alors des experts qui estiment que le praticien aurait dû pratiquer une césarienne, car le rythme cardiaque foetal présentait des anomalies. Les experts pointent du doigt « l’attitude attentiste » du praticien, laquelle aurait abouti à un état d’hypoxie majeure de l’enfant.

Jugeant l’offre de l’Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam) insuffisante, les parents saisissent la justice. Le gynécologue mis en cause produit pour sa défense « plusieurs avis médicaux amiables », qui seront rejetés par le tribunal de grande instance en février 2015, puis par la Cour d’appel de Bordeaux en janvier 2017.

Une histoire de calendrier…

En effet, les magistrats estiment que les avis médicaux, se référant à des recommandations du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) édictées en décembre 2007 — soit trois mois après la naissance de l’enfant — ne sont pas recevables. L’arrêt de la Cour d’appel rendu le 31 janvier 2017 explique qu’il n’y a pas de pertinence « dès lors que les données acquises de la science doivent s’apprécier à la date de l’évènement examiné ».

Mais ce n’est pas l’avis de la Cour de Cassation, qui a tranché la question le 5 avril dernier. La Haute juridiction estime qu’un « professionnel de santé est fondé à invoquer le fait qu’il a prodigué des soins qui sont conformes à des recommandations émises postérieurement ». Le médecin avait notamment fait valoir « qu'il n'avait fait que se conformer aux données acquises de la science telles qu'elles résultaient d'un rapport publié dès 2003 aux Etats-Unis et que le CNGOF n'avait fait que reprendre dans ses recommandations de décembre 2007 ».

L’arrêt de la Cour d’appel cassé

Désormais, en cas d’accident médicaux, les praticiens pourront présenter des avis médicaux, même s’ils ont été édités après l’acte mis en accusation. La jurisprudence exacte est précisée par la Cour qui écrit « qu’il incombe alors, à des médecins experts judiciaires d'apprécier, notamment au regard de ces recommandations, si les soins litigieux peuvent être considérés comme appropriés ».

La plus haute juridiction de l'ordre judiciaire a ainsi cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux et renvoyé l’affaire devant celle de Toulouse, qui devra se replonger dans un litige qui dure depuis plus de dix ans, mais qui a permis la naissance d’une protection supplémentaire pour les médecins.

Source:

Thomas Moysan

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