Quand les préjugés nous aveuglent

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Médecins sous influence

Quand les préjugés nous aveuglent

Dans le dernier numéro de What’s up Doc, nous relations des histoires de praticiens qui ont, à un moment de l’exercice, réalisé que leur jugement médical était altéré par des préjugés. La place nous manquait dans le magazine pour faire entrer tous les témoignages que nous avons reçus. Voici ceux auxquels vous avez échappé.

 

Cédric*, gastro-entérologue. J’avoue que pour moi, le plus difficile, ce sont les SDF qui sont sales et qui sentent mauvais. Tu ne les examines pas vraiment à fond, parce qu'ils puent l'alcool, parce qu’ils sont endormis à cause de leur alcoolémie... Et pourtant, je sais qu’ils ont parfois une septicémie, un traumatisme crânien grave, un infarctus... Bref, ce sont les patients les plus à risque d'avoir une pathologie méconnue !

Camille*, psychiatre en hôpital MCO. Un patient octogénaire est hospitalisé pour une décompensation cardiaque. Il est capable de s’exprimer, malgré une démence légère. Mais à l’instant où le cardiologue lit la mention « démence » sur le dossier, tout change. Le patient devient aux yeux du praticien un « vieux » dénué de capacité de compréhension. Au lieu de lui demander s’il souffre ou s’il a faim, il se tourne vers l’infirmière. Puisque ce patient est dément, quelle nécessité y a-t-il à lui parler ?

Cécile*, urgentiste. Je suis de garde, la nuit. Vers quatre heures du matin, alors que j'espérais pouvoir aller me coucher, un homme d’une quarantaine d’années arrive. Il est incapable de s’exprimer clairement, et saute littéralement sur place. Bref, il est impossible à examiner. Je me dis qu’il a pris beaucoup de coke. Heureusement, sa femme arrive et me raconte qu'il ne boit pas d'alcool, ne prend pas de drogue, et que tout a commencé par une douleur abdominale. Le diagnostic final est bien loin de la toxicomanie à laquelle j’avais pensé initialement : colique néphrétique.

Cécile* à nouveau. Je suis externe, en stage à la polyclinique de Lariboisière. Un homme d'une cinquantaine d'années, d'origine turque, se présente. Il est tellement agité qu'il se cache sous le brancard de la salle de consult’, dont il ne veut pas se laisser déloger. Tout le monde bien sûr pense à un problème psy, et le médecin envisage d’appeler la sécurité. Heureusement, un membre de l’équipe parvient à parler au patient, avec un interprète. Diagnostic : embolie pulmonaire. Cette personne aurait pu mourir si elle avait été renvoyée dans la rue.

* Le prénom a été modifié

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Propos recueillis par Adrien Renaud

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