Maternité Lariboisière : un tourbillon infernal pour les soignants ?

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Dans une tribune récente, une quarantaine de soignants de la maternité de l’hôpital Lariboisière (infirmières puéricultrices, infirmières, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes, sages-femmes… ) tirent la sonnette d’alarme sur leurs conditions de travail et la vétusté de leurs locaux. Le collectif Inter-urgences et la direction de l’AP-HP viennent de réagir.
 

Maternité Lariboisière : un tourbillon infernal pour les soignants ?

« Le service est à bout de souffle, n’a plus d’énergie, et rien n’est fait…. (…) À tous les niveaux c’est la menace d’un craquage complet de l’ensemble de l’équipe ! » Les soignants de la maternité de l’hôpital Lariboisière (infirmières puéricultrices, infirmières, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes, sages-femmes… ) tirent la sonnette d’alarme dans une tribune publiée sur le site du collectif Inter-Urgences.
 
À l’origine de ce cri de détresse cosigné par une quarantaine de soignants du service : la vétusté des locaux où l’on ne compte plus les prises électriques non protégées, les moisissures aux plafonds, les canalisations qui se bouchent régulièrement, les matelas de lit et les fauteuils lacérés, le matériel de soins qui tombe régulièrement en panne et n’est remplacé que 3 semaines plus tard…

Quant au collectif Inter-Urgences, il rappelle qu'une « petite salle sert de lieu d’hébergement aux personnes les plus vulnérables. » Tandis que « les jeunes parturientes et leurs bébés sont parquées dans un espace de quelques mètres carrés ».
 
Une situation intenable qui fait dire aux soignants : « Comment assurer la sécurité des patientes, des bébés quand nous sommes en sous effectifs à flux tendu, que nous vivons au-dessus de nos moyens d’accueil puisque tous les hôpitaux parisiens persistent et signent à nous envoyer les personnes en précarité ? (…) Nous ne pouvons plus travailler dans ces conditions, nous faisons de la maltraitance envers les patients et rien n’est fait. »

L'audit qui fait mal

Le personnel est d’autant plus en colère et dépité qu’il avait déjà informé la direction en septembre 2018 sur leur difficulté à prendre en charge correctement et accueillir les patientes et leur bébé. Mais l’audit que les soignants ont réussi à obtenir aurait surtout « permis à la direction de l’hôpital de nous appuyer la tête encore plus sous l’eau. La réponse de cet audit est la suppression de 16 postes d’infirmières, de 2 postes d’infirmières puéricultrice sans pour autant baisser l’activité », dénonce la tribune.
 
Poussée à réagir, la direction de l’AP-HP se défend dans un communiqué daté du 25 septembre. Selon elle, la majorité des équipes est dans l’attente d’une mise en œuvre rapide de « solutions concrètes » pour résoudre ces « dysfonctionnements ». Mais « les membres du CHSCT local ayant demandé une expertise qui sera présentée le 3 octobre 2019, les décisions suivantes ne peuvent pas être mises en place pour le moment ».
 
Ces décisions seraient les suivantes selon la direction :
 
- Un nécessaire renforcement des effectifs de la maternité avec la création de 5 emplois en ciblant en particulier le secteur des consultations et la salle de naissance.
- La réorganisation des unités d’hospitalisation en remplaçant en partie les infirmières par des sages-femmes, comme c’est le cas dans la plupart des maternités.
- L’homogénéisation des cycles horaires de travail avec la mise en place des « 12 heures » pour les sages-femmes et auxiliaires de puériculture/aide soignantes « afin d’améliorer la cohérence des horaires entre les équipes et diminuer les transmissions d’information, trop nombreuses en raison des différents rythmes de travail ».
 
À la veille de la mise en place de cette nouvelle organisation de service, le personnel de la maternité n’est plus « en mesure de planifier quoique ce soit. Aucune clarté sur les nouvelles missions, les nouveaux horaires. »
 
Informés par la direction de Lariboisière de la mise en place des « 12 heures » en novembre prochain, les soignants demandent depuis plusieurs mois l’annonce et la présentation de leurs plannings. Des demandes restées sans réponse.

Suppressions de postes non anticipées  ?

Les soignants de Lariboisière considèrent donc que « ces suppressions de poste ne sont pas du tout anticipées ni réfléchies à la hauteur de notre travail car à compter du mois de novembre les infirmières puéricultrices par exemple ne pourront plus poser ni congés annuels ni de repos récupérateurs car en sous-effectif. »
 
Et quand le personnel demande des explications, « on nous demande de nous taire car c’est « comme ça ». Nous devons accueillir les autres patientes donc faire de la place. Un éternel recommencement, un tourbillon infernal où nous soignants nous continuons à nous enfoncer pour mieux nous noyer… »
 
Quant au collectif Inter-Urgences, il considère que l’hôpital est encore une fois « tiraillé par ses évolutions historiques contradictoires, entre les missions sociales (que le ministère refuse de qualifier depuis le début du mouvement de grève), l’hyper spécialisation et la rigueur budgétaire. »
 
Et lance, avec un brin d'ironie, à tous ceux qui ne jurent que par la sacro-sainte organisation censée remédier à tous les maux depuis des décennies. « Si ce n’est qu’une question d’organisation, peut-être sera-t-il proposé de déplacer ces personnes dans un autre placard plus excentré afin de majorer encore l’invisibilité de ces situations ? »
 

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