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Le conseil, sorte de parlement de l'Assurance maladie où siègent les partenaires sociaux et des institutions de l'assurance santé, a rejeté le projet gouvernemental de doubler les franchises, des reste à charge non remboursables que doivent acquitter les assurés sociaux sur leurs consultations médicales, médicaments, actes paramédicaux, ou transports sanitaires.
Ainsi la Mutualité Française dénonce dans un communiqué envoyé hier soir le doublement des franchises médicales et des plafonds, jugé injuste, sans étude d’impact et porteur de risques accrus de renoncement aux soins. Elle critique une logique purement comptable qui fragilise encore l’accès aux soins, les comptes sociaux et accroît les inégalités. Face à cette dérive, elle appelle à des États généraux de la santé et de la protection sociale pour bâtir des solutions structurelles et justes.
Mais ce vote et ces déclarations donnent paradoxalement au gouvernement la possibilité d'aller de l'avant dans son projet et de publier ses décrets, dans la mesure où il était seulement tenu de demander son avis au conseil, et non de le suivre.
« Les franchises médicales sont actuellement à 50 euros par an. Et ce que le gouvernement et la Sécurité sociale envisagent, c'est de les passer de 50 euros par an à 100 euros par an », a expliqué François Bayrou jeudi soir sur France 2.
« Je trouve que c'est une mesure qui fait en effet partie des efforts normaux qu'on devrait pouvoir tous accepter pour que notre pays se sauve. Ce qui est en question aujourd'hui (…) ça n'est pas faire des sacrifices excessifs, c'est faire chacun un geste pour que le pays se sauve », a-t-il plaidé, sans pour autant clairement confirmer qu'il signerait le décret.
Selon le projet gouvernemental, les franchises et participations forfaitaires payés par les patients (aujourd'hui 1 euro sur chaque boite de médicament, 2 euros sur la consultation du généraliste...) seraient doublées.
https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/doublement-des-franchises-medicales-cest-non-pour-la-cnam
Les deux plafonds annuels qui permettent de limiter l'impact sur les patients qui ont besoin de beaucoup de soins seraient également doublés, à 100 euros contre 50 aujourd'hui.
Ces projets destinés à freiner la croissance des dépenses de santé ont été étrillés par les syndicats et les associations de patients, qui dénoncent l'impact de la mesure pour les plus fragiles.
Ils s'indignent également de voir ces mesures prises in extremis par un gouvernement sur un siège éjectable.
« J'appelle solennellement le Premier ministre à renoncer à ce décret. On ne peut pas dans le même temps dire : 'Je me soumets à un vote de confiance' et dans l'autre, avancer à marche forcée et vouloir passer en force les mesures de son budget discrètement en catimini par décret, c'est honteux », avait fustigé mardi Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT.
Jeudi, après le vote du conseil de l'Assurance maladie, Catherine Vautrin a gardé un certain flou sur les intentions du gouvernement.
Pas fini d'ici lundi
Pour une partie du dispositif, le gouvernement doit encore recueillir l'avis du Conseil d'Etat, et « ça ne sera pas fini d'ici lundi », a-t-elle reconnu devant la presse, lors d'une visite à la caisse primaire d'Assurance maladie de Paris sur la lutte anti-fraude.
Selon des documents de l'Assurance maladie, ces mesures non publiables immédiatement sont le doublement des participations forfaitaires sur les consultations et actes médicaux (d'une fourchette de 2 à 3 euros aujourd'hui, à une fourchette de 4 à 5 euros demain).
En revanche, Catherine Vautrin n'a rien dit sur les autres mesures qui n'ont pas besoin d'examen par le Conseil d'Etat et sont donc publiables : doublement des franchises sur les boites de médicament (à 2 euros), des actes paramédicaux (à 2 euros), les transports sanitaires (à 8 euros), et doublement à 100 euros des plafonds annuels, y compris sur les consultations.
François Bayrou avait annoncé mi-juillet sa volonté de doubler les franchises médicales, dans le cadre de son plan de réduction de la dépense publique.
Il avait indiqué à ce moment-là qu'il voulait diminuer de moitié la progression des dépenses maladie en 2026, à 5 milliards d'euros contre 10 milliards prévisibles aujourd'hui.
« C'est incompréhensible de vouloir taper sur les malades, alors qu'on est en pleine incertitude politique, et qu'il n'y a aucune autre mesure annoncée » pour mettre à contribution d'autres catégories, a estimé jeudi après le vote de la Cnam Dominique Corona, secrétaire général adjoint de l'Unsa, et membre du conseil de l'Assurance maladie.
Avec AFP