Faut-il instaurer un examen médical pour la conduite des personnes âgées ?

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Un grave accident de la route provoqué par une conductrice de 88 ans relance le débat sur la mise en place d’un examen médical obligatoire à la conduite pour les personnes âgées.

Faut-il instaurer un examen médical pour la conduite des personnes âgées ?

Terrible drame dans le centre-ville de Montauban ce jeudi. Alors qu’elles traversaient un passage piéton, deux femmes âgées de 84 ans et 67 ans ont été violemment percutées par une voiture. L’une est morte sur le coup, l’autre une fois transportée à l’hôpital. Une enquête pour homicide involontaire a été ouverte. La conductrice du véhicule dit n’avoir pas vu les deux victimes traverser : elle est âgée de 88 ans.

L’âge de la conductrice pousse évidemment à s’interroger sur la nécessité de mettre en place, à partir d’un certain âge, un examen médical obligatoire et régulier permettant de vérifier si la personne est encore capable de conduire un véhicule. Le débat est régulièrement relancé par divers drames de la route provoqués par des conducteurs très âgés. En 2018, une jeune femme a dû être amputée d’une jambe après avoir été percutée par un automobiliste de 92 ans ayant perdu le contrôle de sa voiture et a vu sa carrière de joueuse de tennis brisée en un instant. La même année, un bébé de 15 mois avait été tué en Corrèze par un conducteur de 85 ans souffrant de troubles visuels.

Examen dès 50 ans pour les conducteurs italiens

Plusieurs pays européens ont déjà sauté le pas et imposent à leurs conducteurs les plus âgés de passer un examen médical régulièrement (généralement tous les 5 ans) afin de faire renouveler leur permis de conduire : dès 75 ans aux Pays-Bas, 70 ans au Danemark, 65 ans en Espagne et même 50 ans en Italie. En France en revanche, comme en Allemagne et en Belgique, le permis de conduire est délivré à vie, sauf pour les personnes souffrant de certaines maladies pouvant affecter la conduite (comme le diabète et l’épilepsie) et aucun examen médical n’est exigé pour les personnes âgées souhaitant continuant à conduire. Tout juste l’article R. 221-14 du code de la route permet au préfet d’imposer un examen médical à un conducteur dont il estime que « l’état de santé peut être incompatible avec le maintien du permis de conduire ».

En 2017, la députée LR Virginie Duby-Muller avait déposé une proposition de loi visant à obliger les personnes âgées de 70 ans et plus souhaitant continuer à conduire à effectuer une visite médicale tous les 5 ans. La proposition donnait aux médecins le pouvoir d’interdire totalement ou partiellement (conduite uniquement le jour, interdiction d’aller sur l’autoroute…) le volant aux personnes âgés. Mais la proposition de loi n’est finalement pas allée au bout du parcours législatif. Il faut dire qu’une telle mesure serait sans doute vécue comme « stigmatisante » par les personnes âgées qui sont également, rappelons-le, les personnes qui votent le plus. En 2018, Christophe Castaner et la future Première Ministre Elisabeth Borne s’étaient tous deux déclarés opposés à cette mesure, craignant qu’elle n’isole encore un peu plus les personnes âgées.

Faites comme Philippe

Epineuse politiquement, une telle mesure est également discutée sur le fond. Certes, il est indéniable que les capacités auditives et visuelles ainsi que la concentration diminuent avec l’âge. Certes, les plus de 65 ans sont surreprésentés parmi les victimes d’accidents de la route, puisqu’ils comptent pour 25 % des tués (pour seulement 20 % de la population). Mais les seniors sont également ceux qui sont le moins responsables d’accidents. Ainsi, moins de 10 % des accidents mortels sont provoqués par des conducteurs âgés de 65 à 74 ans. A l’inverse, les 18 à 24 ans, en raison de leur comportement à risque, provoquent 19,2 % des accidents conduisant à la mort.

Pour le moment, la France préfère donc en appeler à la responsabilité de ses anciens et espère qu’ils auront la sagesse d’abandonner le volant quand ils ne se sentiront plus capables de conduire en toute sécurité. Sans doute faut-il prendre ici l’exemple du Prince Philippe. En 2018, le défunt époux de la reine d’Angleterre avait provoqué un accident de la circulation alors qu’il conduisait à 97 ans. Le conducteur princier avait alors remis de lui-même son permis de conduire aux autorités de son épouse (qui elle en tant que souveraine n’a pas besoin de permis de conduire…).

Nicolas Barbet

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