Et le navet va...

Article Article

Ciné week-end : Fortunata, de S. Castellitto (sortie le 24 janvier 2018)

Et le navet va...

Fortunata est une battante : aux prises avec un mari violent dont elle est en train de divorcer, l'évaluation psychologique de sa fille dans le cadre de la procédure judiciaire et des difficultés financières l'empêchant d'ouvrir son salon de coiffure, elle tente de garder la tête hors de l'eau. Ce qui ne l'empêche pas de s'en remettre un peu trop souvent à la bonne fortune, quitte à ce qu'elle ne le soit pas tant que ça... Un film bien prétentieux qui part totalement à la dérive !

Curieux naufrage que ce film rital qui commence pourtant bien, mise en scène léchée et almodovaresque, héroïne n'ayant pas froid aux yeux interprétée avec une fougue qui sonne juste par Jasmine Trinca, personnages au bord de l'éruption... Les premières minutes nous laissent espérer que Sergio Castellitto se laissera porter par une inspiration dépassant l'hommage poli aux ancêtres de Fortunata que sont Mamma Roma ou La Ciociara.

Mais naufrage il y a. Incontestablement. Peut-être fallait-il s'y attendre, l'histoire centrale reposant sur une noyade. On se demande quelle mouche a piqué le réalisateur et la scénariste pour qu'aucun ne se soit rendu compte à quel point l'oeuvre évolue vers des sommets de ridicule. Le point de bascule correspond clairement au moment où le psy, campé par un Stefano Accorsi incapable de se défaire de la caricature du bellâtre possédant la vérité, pète littéralement les plombs pour donner libre cours à sa passion bien impulsive pour la mère de sa patiente. Le voir régulièrement râler et s'emporter contre elle, lui reprocher son manque de prise en compte des lois tout en se lamentant de façon presque jouissive de se libérer des règles élémentaires de sa déontologie, offre des scènes d'un ridicule achevé. Un moyen de court-circuiter l’ignominie qu’elles sous-tendent?

Dès lors, chaque personnage laisse libre cours à son hystérie, à sa bipolarité, à sa démence, à sa psychopatie... Chacun s'en donne à coeur joie, au détriment d'une certaine tenue et d'une indispensable cohérence. On est largués, et il est probable que tout à son envie manifeste de renouveler la verve des belles années du cinéma italien, Castellitto s'en contrefiche...

Source:

Guillaume de la Chapelle

Les gros dossiers

+ De gros dossiers