Pour faire face au problème des charlatans qui mettent en danger la vie des patients, le Bengale occidental a décidé de leur organiser des séances de formation. Une étude publiée dans Science vient de montrer qu’une telle stratégie pouvait porter ses fruits.
Des praticiens trop peu nombreux et surchargés, des médecines parallèles qui fleurissent et mettent en danger les patients, ça vous dit quelque chose ? Non, nous ne sommes pas en France, mais dans l’État indien du Bengale occidental. Dans cette région comme dans le reste du sous-continent, le nombre de médecins est insuffisant pour répondre aux besoins de la population. Celle-ci se tourne donc largement vers des soignants « informels », pour dire les choses gentiment. Face à ce problème, les autorités locales ont choisi une stratégie originale : au lieu de chercher à interdire les praticiens dangereux, elles cherchent à les former.
Le quotidien The Hindu a en effet annoncé ce week-end que 3000 ex-charlatans allaient suivre un cours qui va durer six mois. « L’objectif est de transformer des "docteurs" auto-proclamés et non-formés en une équipe de professionnels de santé qualifiés qui peuvent fournir des soins primaires dans les villages, détecter les situations à risque et référer les patients à des médecins qualifiés », explique le Dr Abhijit Chowdhury, responsable du programme cité par The Hindu.
Les charlatans réduisent l’écart
La grande question est, bien entendu, de savoir si une telle formation permet d’améliorer la sécurité des patients. Une étude co-écrite par Abhijit Chowdhury et publiée dans Science la semaine dernière semble montrer que oui. Il s’agit d’un essai randomisé portant sur une session précédente de la même formation. Alors que l’adhésion aux check-lists de la part des praticiens informels non-formés était de 14 points inférieure à celle des médecins, cet écart était réduit de moitié chez les participants à la formation. Il disparaissait même quasiment pour ceux qui s’étaient montrés le plus assidus.
En revanche, la formation n’avait pas d’effet sur la prescription inappropriée. Mais bien que les participants et les non-participants continuent à prescrire trop d’antibiotiques, leur taux moyen de prescription inappropriée restait inférieur de 28 points à celui des médecins du secteur public auxquels ils étaient comparés.
Moralité : si les charlatans font aussi bien ou mieux que les médecins, c'est surtout parce que le niveau de ces derniers laisse à désirer. Une situation qui s’explique notamment par le fait que la durée moyenne d’une consultation médicale dans un hôpital public en Inde est inférieur à deux minutes, et qu’il manque deux millions de médecins dans le pays. Toute ressemblance avec un autre pays serait purement fortuite.
Source:
Adrien Renaud