Décousu de fil noir

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Ciné week-end : Espèces menacées, de G. Bourdos (sortie le 27 septembre 2017)

Décousu de fil noir

A Nice, des êtres prisonniers de leur amour tentent d'influer sur ce qu'ils croient être leur destin, se croisent lors d'occasions apparemment manquées, mais qui peut-être les sauveront... Un film choral et bancal, où les récits peinent à se mêler, où manque la fulgurance d'un Lelouch - dans ses bons moments - ou d'un Iñárritu. Une déception.

On ne remettra pas en cause le titre du dernier film de Gilles Bourdos puisqu'il correspond à celui du livre qu'il adapte. Tout juste remarquera-t-on qu'il est à l'image de la narration : obscur. Espèces menacées se concentre sur trois histoires sans que jamais réellement l'on ne comprenne l'intérêt de les avoir réunies dans un même film. Premier défaut. Ajoutons qu'un seul des trois récits nous a donné envie de suivre les personnages, cela fait un film aux deux tiers raté. 

Si, à la fin, un lien ténu s'établit entre l'histoire de Joséphine, battue à peine mariée et refusant que ses parents la sauvent des griffes de son tortionnaire domestique, celle de Vincent qui apprend que sa fille est enceinte d'un "jeune homme" de plus de soixante ans le jour où sa femme le quitte, et celle d'Anthony, jeune étudiant timide qui n'arrive ni à finir sa thèse ni à trouver l'amour, ce n'est pas suffisant pour nous faire oublier l'ennui poli et l'agacement ressentis de façon régulière.

Bourdos donne le sentiment de s'être contraint à faire se rencontrer, ne serait-ce que furtivement, tous ses personnages ; du coup, quand cela se produit enfin, il n'en est que plus troublant de constater que ces téléscopages constituent les séquences les plus maladroites du film, sur le fond - ces rencontres sont la plupart du temps avortées - comme sur la forme - elles sont particulièrement artificielles. 

Au final, Espèces menacées est un film sur la difficulté d'aimer qui réussit à décrire les mécanismes d'emprise à l'oeuvre dans la violence conjugale mais qui, alignant les lourdeurs scénaristiques, les clichés sociétaux et les effets de surprise souvent gênants, donne au final un film noir construit comme un vaudeville. Pourquoi pas, mais quitte à être casse-gueule, mieux vaut bien se réceptionner !

Source:

Guillaume de la Chapelle

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