Christophe Prudhomme, porte-parole de l’AMUF : «Notre dernier recours cet été ? La grève ou la démission collective»

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Colère et amertume pour le Dr Christophe Prudhomme, urgentiste au Samu 93 et porte-parole de l’AMUF (Association des médecins urgentistes de France). Alors que les urgences traversent une crise aigüe, la ministre de la Santé a refusé hier de recevoir les représentants des personnels hospitaliers à l’issue de la mobilisation. A quel genre d’été se préparent les soignants des urgences ?

Christophe Prudhomme, porte-parole de l’AMUF : «Notre dernier recours cet été ? La grève ou la démission collective»

What’s up Doc : Quelle est la situation dans les services d’urgences ?
Christophe Prudhomme
 : Une centaine de services sont contraints à des fermetures de nuit et de week-end, un chiffre qui varie de jour en jour. Dans certains services, comme au CHU de Toulouse, des grèves ont démarré. Cette situation déjà catastrophique ne pourra que s’aggraver d’ici cet été en raison de l’augmentation continue des démissions et arrêts maladie des personnels épuisés. A l’hôpital, tous services confondus, entre 150 000 et 200 000 infirmières en âge de travailler ont jeté l’éponge ces dernières années.

Comment allez-vous travailler dans ces conditions dégradées ?
CP.
 : Les préconisations faites par le gouvernement et relayées par les ARS sont les suivantes : limiter les congés des personnels en poste à 15 jours et demander aux jeunes qui sortent des écoles d’être en poste dès le 28 juillet. Ces mesures coercitives sont contre-productives : elles vont aggraver les démissions à la rentrée. Nous demandons depuis des années que les indemnités de garde soient doublées, partout à l’hôpital (pas qu’aux urgences), comme ça on pourrait casser les reins à l’intérim. Est-ce que le gouvernement va annoncer des revalorisations début juillet ? Je ne sais pas et c’est trop tard pour cet été car les plannings sont déjà faits. Les personnels vont prendre leurs congés et les intérimaires -qui gagnent suffisamment d’argent et veulent maîtriser leur temps de travail- vont partir en vacances.

Qu’attendez-vous de la « mission flash » ?
CP.
 : Absolument rien ! Des rapports sur les urgences on en a déjà pléthore. Que va recommander cette mission ? D’appeler le 15 avant d’aller aux urgences ? Mais le 15 aujourd’hui a déjà du mal à décrocher. Si tous les patients qui trouvent porte close aux urgences appellent le 15, les Samu vont s’effondrer. Le fameux service d’accès aux soins -qui soi-disant allait tout résoudre- ne marche pas. De simples conseils par téléphone ne suffisent pas et c’est une prise de risque pour les patients. Il faut plus de médecins effecteurs. Hier, la ministre de la Santé a refusé de recevoir la délégation représentant les 9 organisations appelant à la mobilisation (CGT, Sud, FO, Collectif inter-urgences et inter-hôpitaux, AMUF, APH, etc…) au motif qu’elle n’avait pas le temps. Si les discussions, c’est seulement avec le Dr François Braun [qui pilote la « mission flash », ndlr], on ne va nulle part ! Nous sommes face à un refus de tout dialogue social. 

Quelles sont les pistes pour passer l’été ?
CP.
 : Mettre tous les médecins autour de la table et rétablir l’obligation de garde pour tout le monde, qu’on travaille en clinique, à l’hôpital, en ville, qu’on soit médecin généraliste ou diabétologue. Qu’on réserve les urgentistes et les véhicules du Samu aux patients les plus graves. Aujourd’hui, si vous avez la malchance d’habiter dans l’Orne ou dans la Mayenne, quand vous appelez le Samu, ce n’est plus un médecin qui arrive, c’est une infirmière avec un protocole ! C’est une perte de chance pour les patients.

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