La version soft du PLFSS suffira-t-elle à calmer la colère des médecins ?

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Le projet de budget de la Sécurité sociale voté in extremis à l'Assemblée, en partie vidé de mesures qui mettaient en ébullition les médecins libéraux pourrait éloigner le spectre d'une grève massive début janvier. Les praticiens s'interrogent et trancheront en fin de semaine. 

La version soft du PLFSS suffira-t-elle à calmer la colère des médecins ?

© Midjourney x What's up Doc

 

Ulcérés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, la coalition de chirurgiens « Le Bloc », puis les six syndicats représentatifs des médecins libéraux (MG France, Avenir-Spé/Le Bloc, CSMF, FMF, SML, UFML-S) étaient montés au créneau ces dernières semaines, appelant à une grève « sans précédent » à partir du 5 janvier.

Mais après avoir « peu dormi » et fait chauffer son téléphone ces derniers jours, le président de la CSMF Frank Devulder est plutôt soulagé. « On a réussi à faire entendre raison au pouvoir politique », se réjouit-il.

La copie adoptée en deuxième lecture mardi soir à l'Assemblée nationale a été largement édulcorée.

Peu avant le vote, dans un ultime revirement, l'exécutif a annoncé renoncer à l'article 24, l'un des principaux irritants. Il aurait donné le pouvoir à l'Assurance maladie de revoir unilatéralement certains tarifs d'actes médicaux, quand une situation de « rentabilité excessive » était constatée. Radiologues, radiothérapeutes ou néphrologues étaient visés.

« Ce qui nous faisait disjoncter, c'est que le gouvernement faisait le choix de contourner les corps intermédiaires », d'agir « de manière autoritaire », alors que les tarifs médicaux sont normalement négociés entre syndicats et Assurance maladie, rappelle Frank Devulder.

Les députés avaient déjà enterré début novembre l'article 26, prévoyant l'instauration d'une sur-cotisation sur les dépassements d'honoraires des médecins de secteur 2 (conventionnés avec l'Assurance maladie, avec dépassements autorisés).

C'est cette mesure qui avait initialement mis le feu aux poudres, poussant les chirurgiens, anesthésistes et gynécologues-obstétriciens du Bloc à organiser du 5 au 19 janvier « l'opération Bruxelles », un mouvement de grève et « d'exil » symbolique en Belgique, devant provoquer la « fermeture des blocs opératoires » des cliniques privées.

Pas totale confiance

Le gouvernement a aussi consenti à augmenter le budget de l'Assurance maladie d'un milliard d'euros par rapport au texte initial, et s'est engagé à ne pas augmenter les franchises – reste à charge dû par les patients lors d'une consultation – un projet qui hérissait MG France, le premier syndicat de généralistes.

Le PLFSS doit encore repasser au Sénat, avant un dernier vote à l'Assemblée. « Tant qu'on n'a pas la version définitive, on attend. On n'a pas de raison aujourd'hui de crier victoire ou de rétropédaler » concernant la grève, juge Agnès Giannotti, présidente de MG France.

« Les franchises, c'est retiré », mais comment garantir « qu'ils ne vont pas les remettre par décret ? », se méfie-t-elle. Par ailleurs, l'enveloppe dédiée au financement des soins de ville reste « insuffisante » et le texte contient toujours une mesure limitant toute première prescription d'arrêt maladie à un mois, un « non-sens », ajoute-t-elle.

Réponse en fin de semaine

Les syndicats critiquent encore l'obligation d'alimenter le dossier médical partagé (DMP) – carnet de santé numérique, qu'ils ne jugent pas au point et très chronophage – les exposant à des sanctions financières.

« Nous n'avons absolument aucune garantie de l'inviolabilité du DMP » et « si le patient s'oppose, on fait quoi ? », interroge Jérôme Marty, président de l'UFML-S.

Il liste divers articles toujours « problématiques » comme celui prévoyant le déremboursement des prescriptions des médecins de secteur 3 (non conventionnés), ou d'autres qui pourraient, selon lui, ouvrir la voie à une baisse de certains tarifs imposée par les autorités. « On n'a aucune confiance », dit-il.

L'intersyndicale se réunira en visioconférence jeudi soir pour décider de la suite. L'UFML-S veut « poursuivre le mouvement ».

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/video/plfss-convention-medicale-deficit-thomas-fatome-le-directeur-de-lassurance-maladie-repond-aux

Mercredi après-midi, le président du Bloc Philippe Cuq s'entretenait également avec des juristes, craignant aussi « qu'il y ait un loup » dans ce texte. « À ce stade, on reste inquiet », dit-il.

Le conseil d'administration du Bloc se réunira vendredi pour décider du sort de « l'opération Bruxelles ». Aujourd'hui, le syndicat compte « plus de 2 000 médecins inscrits ».

Avec AFP

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