Une voix discordante chez les médecins du travail

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Le président du Collège des enseignants soutient (presque) la loi El Khomri

Une voix discordante chez les médecins du travail

La médecine du travail semble unie contre la loi El Khomri, qui prévoit notamment la suppression de la visite médicale obligatoire à l’embauche. Mais le Pr Jean-Marc Soulat, président du collège des enseignants de la discipline, fait entendre une petite musique différente. Interview.

 

What’s up Doc. Que pensez-vous de la position du Conseil de l’Ordre, qui s’inquiète dans un communiqué publié hier d’une possible disparition des visites médicales obligatoires dans le cadre de la loi El Khomri ?

Pr. Jean-Marc Soulat.  Je suis d’accord avec l’Ordre pour dire que d’une manière générale, la santé des travailleurs doit être suivie par les médecins du travail. Mais comme dans les autres spécialités, ce suivi doit selon moi être différencié en fonction des personnes. Contrairement à l’Ordre, je souhaite donc la disparition des visites médicales règlementées systématiquement, qui accaparent les médecins du travail et qui n’ont à mon sens pas de réelle justification, que ce soit en suivi périodique ou à l’embauche.

WUD. Le travailleur ne devrait donc plus voir de professionnel de santé au moment de l’embauche ?

JMS. Si ! Il me paraît indispensable que lors de l’embauche, il y ait un temps d’information sur les risques professionnels que la personne peut rencontrer, et sur la manière de les prévenir. Mais cette information peut être donnée par une infirmière, il n’y a dans la plupart des cas pas besoin d’un examen médical. L’idée, c’est d’alléger la charge du médecin du travail sur les visites obligatoires, qui phagocytent une partie de son activité au détriment de son action sur le milieu de travail ou sur le maintien dans l’emploi.

WUD. Pensez-vous que, comme le prévoit le projet de loi, les visites médicales systématiques doivent être réservées aux postes à risque ?

JMS. Au Collège des enseignants en médecine du travail, nous préférons effectivement réserver la visite d’aptitude aux cas où une carence médicale est susceptible d’entraîner un danger immédiat pour la personne. Cela réduit le nombre de postes concernés, ce qui est une façon d’alléger la charge du médecin du travail.

WUD. Vous semblez donc penser que la loi El Khomri va dans le bon sens, du moins pour ce qui est de ses dispositions concernant la médecine du travail…

JMS. Franchement, pour l’instant, je ne saurais pas le dire, tout va se jouer au niveau des décrets d’application. S’ils élargissent la notion de poste à risque à tous les postes susceptibles d’exposer le travailleur à un risque professionnel, par exemple, cela concernera une grande partie des postes de travail, et il n’y aura pas grand-chose de changé.

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Propos recueillis par Adrien Renaud

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