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Pierre-Olivier K., âgé de 33 ans, avait été mis en examen le 26 avril pour homicide volontaire, ont appris vendredi l'AFP et Le Parisien de sources proches du dossier, confirmées par le parquet de Paris. Lui assurait avoir agi en légitime défense.
Des rondes rapprochées qui n’ont pas pu l’empêcher de s’enlever la vie
L'homme avait d'abord été placé sous contrôle judiciaire, puis envoyé, sur appel du parquet, en détention provisoire à la prison de Fresnes le 14 mai, en banlieue parisienne.
Samedi, il a été retrouvé pendu au sein du quartier des arrivants, selon deux sources proches du dossier. Ce secteur bénéficie de "rondes rapprochées", mais "il ne peut y avoir de personne pour surveiller en permanence" dans une prison de 1 700 détenus, fait valoir l'une d'entre elles.
Surtout, le jeune homme ne présentait pas "de signe précurseur" suicidaire, assure la seconde.
Une détention pour le protéger de lui-même qui a eu l’effet inverse
Tout décès en prison entraîne une enquête pénale.
Le parquet de Créteil, qui dirige celle sur la mort de Pierre-Olivier K., a expliqué que la thèse du suicide était confirmée par "les constatations, le courrier laissé par l'intéressé à ses proches et les résultats de l'autopsie".
Ses parents et son conjoint veulent toutefois qu'une autre enquête soit ouverte pour homicide involontaire et pour mise en danger de la vie d'autrui. Ils déplorent le choix des magistrats d'avoir écroué leur proche.
"Le motif principal pour lequel la détention a été demandée était pour le protéger contre lui-même d'un suicide et pourtant, c'est cette incarcération qui l'a tué", s'est indigné leur avocat, Me Patrick Ramaël.
L'incarcération, un sentiment de trahison pour Pierre Olivier
Jeudi, ils ont porté plainte contre X.
Au commissariat, le père a raconté, bouleversé, l'appel de son fils, deux jours avant sa mort : "Sors-moi de là, papa, c'est l'enfer".
Son fils, qui "était très fier" d'avoir "passé sa vie à servir son pays", "n'a absolument pas compris son incarcération, il s'est senti trahi", a-t-il aussi témoigné, d'après la plainte dont l'AFP a eu connaissance.
Une attaque soudaine qui l’a forcé à faire usage de son arme
L'affaire débute le 5 septembre 2023, au Tchad.
Un soldat vient sur l'antenne militaire de l'emprise Faya Largeau pour soigner un doigt infecté, selon le parquet de Paris.
Le soldat sera retrouvé "mortellement touché par plusieurs balles".
D'après le récit de l'infirmier, livré à ses proches, ce patient tchadien l'a soudainement attaqué à plusieurs reprises avec un scalpel.
Pierre-Olivier K. aurait alors "appelé à l'aide" par talkie-walkie, et se serait défendu en braquant son arme et en "faisant des sommations", rapporte Me Ramaël.
Mais le soldat aurait persisté, le menaçant avec une "paire de ciseaux". Pierre-Olivier K. aurait alors tiré. Un autre militaire, "venu à la rescousse", aurait aussi tiré, poursuit Me Ramaël.
Une enquête a été ouverte au Tchad.
Le militaire tchadien pas dans un état normal mais abattu froidement dans le dos ?
Le 5 septembre, le général Ali Maïde Kebir, gouverneur de la région du Borkou, dont Faya-Largeau est le chef-lieu, assurait, notamment à l'AFP, que le militaire tchadien "n'était pas dans un état normal".
A Paris, un juge d'instruction enquête également sous la direction de la section des affaires pénales militaires du parquet, compétente pour les faits reprochés aux militaires français en opération extérieure.
La version de l'infirmier est alors "remise en question" par "les témoignages des primo-intervenants et les expertises", selon le parquet : le Tchadien "a manifestement été victime de tirs mortels dans le dos et alors qu'il se dirigeait vers la sortie".
L’ADN du soldat Tchadien n’a pas été retrouvé sur le dit scalpel
Que dire des blessures de Pierre-Olivier K. ? "Bénignes", elles ont "pu être auto-infligées", estime le parquet.
Le Tchadien n'avait "aucune trace de sang, et seul le profil génétique du mis en examen a été retrouvé sur le scalpel", poursuit le ministère public.
Une demande pour être réformé et travailler en tant que civil
Après ce drame, l'infirmier "avait été évacué au centre médical à N’Djamena", puis "hospitalisé en psychiatrie en France".
Il avait pu réintégrer son domicile, retrouver son quotidien avec son conjoint et avait demandé à être réformé pour travailler dans le civil.
Ses obsèques ont eu lieu ce vendredi.
Avec AFP